4ème chronique sur les points forts et les points faibles de STS et des IUT. Taux de succès au BTS et au DUT. Nombre annuel de diplômés
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Plusieurs méthodes pour calculer le taux de succès au BTS et au DUT. La première rapporte le nombre d’étudiants qui ont réussi les examens finaux de l’année terminale au nombre d’étudiants présents aux épreuves ou au nombre d’étudiants inscrits en seconde année. C’est la méthode la plus facile pour le calcul du taux de succès, mais elle présente l’inconvénient de mélanger plusieurs populations, les étudiants qui se présentent aux examens pour la 1ère fois et ceux qui redoublent.
La seconde méthode rapporte le nombre d’étudiants qui ont réussi au nombre des étudiants qui se sont inscrits une année donnée en première année de diplôme. C’est la méthode du suivi de cohorte. Elle est plus pertinente d’une part parce qu’elle permet de calculer un taux de succès au diplôme en 2, 3 ans ou plus, d’autre part parce qu’elle prend en compte les étudiants qui ont abandonné en cours de route et qui ne sont pas présentés aux examens. Inconvénient de la méthode : elle prend du temps et elle est plus coûteuse que la 1ère ; elle est donc moins souvent mise en œuvre ; certains suivis de cohorte disponibles sont donc relativement anciens.
Perfectionnement de la seconde méthode : le calcul des taux de succès en fonction des caractéristiques scolaires de la population d’étudiants qui est différente d’un IUT et d’une STS à l’autre (calcul des taux observés et des taux simulés).
Avant de faire état des données disponibles, il est nécessaire de rappeler 1. qu’il y a sélection à l’entrée de ces deux filières professionnelles (ce qui doit en principe induire de bons résultats aux examens), 2. que les résultats dépendent des modalités de contrôle des connaissances (MCC) : il est plus facile d’obtenir le diplôme quand toutes les matières se compensent entre elles et il est plus difficile de l’obtenir quand il faut obtenir la moyenne dans toutes les épreuves. La tendance historique a été de compenser les notes des matières entre elles, ce qui doit induire une progression des taux de succès
En DUT, les MCC ont été modifiées en 1998 pour faciliter l’obtention du diplôme : les taux de succès ont effectivement significativement progressé entre 1997 et 2001. En 2006, les programmes des DUT ont été changés : introduction d’un PPP, projet personnel et professionnel, conduit au cours des 4 semestres. L’expérience – mais il n’y a de preuve statistique faute d’enquête – montre que ce type de matière est souvent bien noté (pourvu toutefois que l’étudiant s’y soit impliqué) ; le PPP facilite donc l’obtention du diplôme.
Taux de succès au BTS calculé selon la 1ère méthode. Il progresse tout au long des années 2000 : 65,8% en 2006, 67,3% en 2007, 68,4% en 2008 (106.000 diplômés sur 155.000 présents aux examens). Le taux varie selon 3 paramètres : le type de baccalauréat obtenu, la filière de formation (secondaire ou tertiaire), le mode de formation. Les bacheliers généraux obtiennent les meilleurs taux de succès : 82,2% pour les bacheliers scientifiques et seulement 43,3% pour les bacheliers professionnels du secteur des services. Les étudiants des secteurs de la production ont un taux de succès plus élevé (81% par exemple en BTS « Matériaux souples ») que ceux des secteurs des services (59,5% en BTS « Assistants de gestion PM1-PME »). Les étudiants sous statut scolaire (76,4%) et ceux inscrits en apprentissage (70,3%) réussissent mieux que ceux en formation continue (57,8%) ou qui ont préparé leur diplôme par l’enseignement à distance (35,6%). Les chiffres : cliquer ici et ici. Les étudiants qui obtiennent le BTS ont en moyenne 22,6 ans (Coppin, 2007), ce qui signifie que, dans les parcours scolaires antérieurs, il y a eu des redoublements.
Suivi de cohortes en BTS. 63% de la cohorte des bacheliers entrés en STS en 2002 (cohorte ancienne donc) ont obtenu leur diplôme en 2 ans et 16% sont toujours en STS en 2004-2005 ; le taux d’obtention en 3 ans n’est donc pas fourni (Péan, 2007). 45% des entrants de 2002 ne sont plus en études en 2004-2005 (parmi eux, les 2/3 ont obtenu leur BTS). 55% sont donc, à la rentrée 2004, encore en études (poursuite d’études après l’obtention du BTS en 2 ans, redoublement en BTS, autres études). 15% ne sont plus en études et n’ont pas obtenu de diplôme.
Le taux de succès au DUT calculé selon la 1ère méthode n’est pas disponible dans les sources de la DEPP. Par contre, le devenir de cohortes d’entrants en 1ère année a été étudié par deux fois (cohorte 2001, cohorte 2004)
Taux de succès de la cohorte 2001. 76% des bacheliers 2001, inscrits en IUT lors de la rentrée qui a suivi l’obtention de leur baccalauréat, ont obtenu leur DUT en 2 ans (66,6%) ou en 3 ans (9,5%) (Péan et Prouteau, 2007). Le taux de succès est plus important pour les DUT du secteur des services (69,5% en 2 ans, 77% en 3 ans) que pour les DUT du secteur de la production (62,9% en 2 ans, 75% en 3 ans) ; il varie ainsi d’un DUT à l’autre (93% en génie de l’emballage et du conditionnement, 67,5% en génie électrique et informatique industrielle). L’étude ne dit pas ce que sont devenus les 24% d’étudiants qui n’ont pas obtenu leur DUT en 2 ou 3 ans. Trois cas de figure sont possibles : certains ont vraisemblablement continué une 4ème d’IUT, d’autres se sont orientés vers l’université, d’autres ont arrêté leurs études ; combien ?
Les taux d’obtention du DUT en 2 ou 3 ans sont très différents selon le baccalauréat d’origine, tant pour les DUT du secteur secondaire que pour ceux du secteur tertiaire. Les meilleurs résultats sont ceux des titulaires d’un baccalauréat général scientifique ou économique.
Les taux varient très fortement d’un IUT à l’autre (taux le plus élevé : 82% ; taux le plus faible : 47%). Les différences dépendant des caractéristiques de la population étudiante inscrite, la DEPP calcule des taux simulés (Péan et Prouteau, 2007). Ceux-ci correspondent à la réussite qu’obtiendrait un DUT « si la réussite de ses inscrits, avec leurs caractéristiques propres (âge d’obtention du baccalauréat, série et ancienneté du baccalauréat, sexe, catégorie sociale, spécialité et secteur d’inscription en IUT) était identique à celle de l’ensemble des DUT ». Des IUT ont ainsi des taux de succès supérieurs aux taux simulés (ils font mieux que ce qui est attendu de leur population étudiante) : c’est le cas des IUT de Lyon 2 (taux réel supérieur de 14,1 points au taux simulé), d’Angers (différence de 10,1 points). A l’inverse, des IUT ont des taux de succès inférieurs aux taux simulés (vu leur population d’étudiants, ils devraient faire beaucoup mieux) ; c’est le cas des IUT de Marne-la-Vallée (taux réel inférieur de 15,2 au taux simulé), de Toulouse 1 (différence de 13,2 points). Lrs chiffres : cliquer ici.
Taux de succès de la cohorte 2004. D’une cohorte à l’autre, les taux de succès ont légèrement baissé : 66,5% de succès en 2 ans (66,6% en 2001) et 9,2% en 3 ans (9,5% en 2001), soit un taux de succès en 2 ou 3 ans de 75,7% (76,1% en 2001) (les chiffres : cliquer ici). Le taux de réussite en 2 ou 3 ans continue d’être très différent d’un DUT à l’autre mais les écarts se sont resserrés par rapport à la cohorte 2001 : 84,6% en information et communication, 68,3% en génie industriel et maintenance. Les taux de succès continuent de varier très fortement selon le baccalauréat d’origine que ce soit en DUT du secteur de la production qu’en DUT du secteur tertiaire : plus de 80% des bacheliers généraux obtiennent leur DUT en 2 ou 3 ans, et seulement 67% des bacheliers technologiques et moins de 50% des bacheliers professionnels. On comprend l’inertie observée dans les IUT : recruter plus de bacheliers technologiques (et a fortiori des bacheliers professionnels) fait baisser le taux de succès !
Nombre de BTS et de DUT délivrés. 146.800 étudiants ont obtenu un BTS ou un DUT en 2007. Plus de 2 sur 3 d’entre eux ont obtenu un BTS, ce qui n’était pas le cas dans les années 1980, avant la décentralisation. Le nombre de diplômes délivrés a très fortement augmenté jusqu’au tournant du siècle : 82.100 diplômes délivrés en 1990, 115.600 en 1995, 143.000 en 2000 (+ 74% en 10 ans). Depuis 2000, le nombre de BTS et de DUT délivrés n’évolue plus guère : 156.000 en 2004 (année record) mais seulement 146.800 en 2007 (en 2008, vu la forte augmentation des BTS délivrés, on devrait s’approcher de nouveau du record). La stagnation des années 2000 n’est pas cohérente avec la volonté politique de porter à 50% le nombre de jeunes qui obtiennent un diplôme du supérieur : les STS et les IUT diplôment moins d’un jeune sur cinq.
Evolution du nombre de BTS et de DUT délivrés. Les chiffres : cliquer ici |
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1990 |
1995 |
2000 |
2001 |
2002 |
2003 |
2004 |
2005 |
2006 |
2007 |
2008 |
DUT BTS |
29.000 53.100 |
37.400 78.200 |
47.500 95.500 |
48.000 99.300 |
48.900 103.500 |
48.100 103.500 |
47.000 109.000 |
45.800 102.500 |
46.100 102.200 |
45.400 101.400 |
… 106.000 |
Total |
82.100 |
115.600 |
143.000 |
147.300 |
152.400 |
151.600 |
156.000 |
148.300 |
148.300 |
146.800 |
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Indice 100 en 1990 |
100 |
141 |
174 |
179 |
186 |
185 |
190 |
181 |
181 |
179 |
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Points forts. Le taux de succès en BTS et en DUT est nettement plus élevé qu’en licence universitaire. 53% des entrants à l’université en licence en 2002 ont obtenu ce diplôme en 3 ou 4 ans (un peu plus obtiendront le diplôme en 5 ans). Ce pourcentage est faible quand on le compare aux taux de succès des entrants dans les diplômes professionnels courts : DUT, 75,7% de succès en 2 ou 3 ans pour les entrants de 2004, BTS, 63% de succès en 2 ans pour les entrants de 2002. Il est vraiment dommage que des suivis de cohortes d’entrant en DUT et BTS ne soient pas effectués chaque année !
Points faibles. Les STS et les IUT ont joué un rôle historique fondamental pour élever le niveau de qualification professionnelle des jeunes. Mais il faut observer aujourd’hui qu’ils ne jouent plus que très imparfaitement ce rôle. Leurs points faibles sont devenus trop nombreux. Ils ne jouent pas leur rôle pour que 50% des jeunes parviennent à obtenir un diplôme de l’enseignement supérieur : stagnation du nombre de diplômes délivrés dans la 1ère décennie 2000 alors que le nombre de STS et de départements d’IUT a poursuivi progression).
Les taux de succès sont bons, meilleurs qu’en licence universitaire, mais diplômer en 2 ans seulement environ 2/3 des entrants, ce n’est pas un résultat mirobolant au vu du contexte : sélection des étudiants à l’entrée, conditions d’études nettement meilleures qu’en licence universitaire, dépense par étudiant nettement supérieure à celle d’un étudiant de licence.
Les responsables de STS et d’IUT invoquent un argument fort pour expliquer le taux de succès relativement bas : il est dû au faible taux de succès des bacheliers technologiques et professionnels. Le cercle vicieux est en place : tout est fait pour attirer dans les DUT et les BTS les bacheliers généraux. Impossible de sortir de ce cercle vicieux : les responsables portent une grande attention aux résultats et sont évalués sur leurs performances. Ils ne peuvent s’interroger sur les raisons d’un taux d’échec élevé des bacheliers technologiques et professionnels : il ne s’agit pas de rendre plus facile l’obtention du diplôme par un laxisme dans l’attribution des notes ; il s’agit d’adapter les contenus, les programmes et les méthodes pédagogiques aux compétences acquises dans le secondaire par ces bacheliers.
Autrement dit, si ces changements fondamentaux ne sont pas possibles, ce n’est pas demain la veille que le taux de 50% sera approché ! Le temps est venu de casser la structuration en IUT et en STS et d’inventer un nouveau type d’établissement : l’Institut d’enseignement supérieur, l’IES.
COPPIN Emmanuelle (2007), « Résultats des brevets de techniciens supérieurs. Session 2006 », DEPP, Note d’information, 07.19, mai
PEAN Sylvaine, PROUTEAU Danielle (2007), « Les nouveaux inscrits en IUT à la rentrée 2005-2006 et la réussite en IUT », DEPP, Note d’information, 07.18, mai