De l’Action, de la Démocratie

A propos des billets d’humeur, publiés dans le feu de l’action et dans le contexte de batailles de communiqués. J’en ai commis sur ce blog depuis janvier 2009 et je l’ai parfois regretté. J’ai donc attendu quelques jours pour écrire celui-ci : il porte sur les moyens utilisés par les personnels et leurs représentants dans l’action revendicative contre les budgets d’austérité 2015 dans les universités. Moyens pour faire progresser le rapport de forces, moyens légaux ou illégaux (susceptibles d’être sanctionnés), moyens décidés selon des processus démocratiques ou non. D’où le titre de cette chronique : de l’Action, de la Démocratie.

P1250190Billet d’humeur, suite à mes deux chroniques du 19 décembre 2014 : Strasbourg. Chaud, la démocratie !, Ledit Dialogue social. Retour sur le communiqué de presse d’Alain Beretz, président de l’université : Le vote du budget de l’Université de Strasbourg a du être reporté en janvier. Le débat démocratique n’a pas pu se dérouler !

Extraits du communiqué. Alain Beretz s’indigne du non respect des instances démocratiques. Sur le budget 2015, le vote n’a pu avoir lieu compte tenu de l’absence de quorum physique… La politique de la chaise vide est tout sauf une contribution positive au débat démocratique. C’est au contraire une entrave au fonctionnement de l’établissement, qui ne respecte pas l’expression démocratique de la communauté universitaire…

Prendre notre université en otage n’apportera rien au débat national, mais compromettra encore plus nos conditions d’études et de travail. Je déplore donc cet artifice de procédure qui bloque le processus normal de décision, y compris celles des services financiers, qui ont fait un travail remarquable… Empêcher le débat des administrateurs, c’est aussi ne pas respecter le choix des électeurs, et remettre en question le débat démocratique… Je déplore donc cet artifice de procédure qui bloque le processus normal de décision…

Des moyens d’action illégaux ont-ils été employés par les administrateurs de l’opposition ? Non ! Lors de l’Assemblée générale du 16 décembre, ils sont parvenus à faire rejeter le blocage physique du CA. Ont-ils pris leur décision de ne pas siéger, de manière non démocratique ? Non ! Il y a eu un accord entre les élus de l’opposition et les élus de la FAGE (en décembre 2012, les 4 administrateurs FAGE avaient voté en faveur de l’élection du président Beretz).

Alain Beretz n’a été ni agressé verbalement, ni molesté, ni séquestré, ni défenestré : ce sont-là des formes d’action violentes et répréhensibles auxquelles des ouvriers et certains syndicats ont recouru au cours de l’histoire des mouvements sociaux. Par son communiqué provocateur, le président de l’université de Strasbourg souhaite-t-il le développement de moyens d’action violents dans son université ? Est-il partisan de la politique du pire, alors qu’il sait très bien que le projet de budget initial 2015 sera voté en janvier 2015 à une large majorité (dont les voix des personnalités extérieures), et ce sans qu’il y ait problème (les Recteurs d’académie ne font plus respecter l’obligation légale de vote du budget avant le 31 décembre ; de même, ils ferment les yeux sur les budgets insincères).

Entre 1980 et 2008, j’ai travaillé avec 11 présidents (ou administrateurs provisoires) dans 3 universités différentes, en tant qu’élu au conseil d’administration ou au CEVU, ou membre d’une équipe de direction (à Marne-la-Vallée), ou directeur d’UFR, ou directeur d’unité de recherche associée au CNRS, ou encore directeur du service des stages ou de l’observatoire de la Vie étudiante. Aucun d’entre eux n’a publié, au cours de son mandat, un communiqué agressif contre des administrateurs.

Pendant mes années de chargé de recherche au CNRS (entre 1969 et 1980), mes recherches et publications ont porté sur les relations professionnelles dans le secteur privé, la négociation, les grèves, les comités de grève et les assemblées générales, l’occupation des lieux de travail, le freinage de la production, l’action directe (deux photos jointes, extraites d’un article publié en 1970, cf. Note) et même le sabotage… Les patrons faisaient tout pour battre la mobilisation ouvrière. L’appel à la police et/ou le lock-out étaient leur forme ultime de répression.

J’espère que le président Beretz regrette son communiqué excessif, commis dans le feu de l’action. J’aimerais qu’il batte sa coulpe et dise ses regrets dans ses vœux aux représentants du personnel, aux syndicats et aux associations. J’aime l’université de Strasbourg. Je n’aimerais pas ne plus l’aimer en 2015 !

Note. L’article sur l’action directe est publié en 1970. C’est en 1970 que la CFDT s’ancre nettement à gauche, en axant son congrès sur trois thèmes : appropriation sociale des moyens de production, planification démocratique, autogestion. Je n’ai pas trouvé en ligne de document de l’époque, mais seulement un article sur la CFDT et les années 68.

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2 Commentaires

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2 réponses à “De l’Action, de la Démocratie

  1. romain

    utiliser une disposition du reglement interieur pour demander le report du vote du budget, puis ensuite s’arranger pour que le quorum physique des membres du CA ne soit pas réuni en matiere de vote du budget, n’ a en effet rien d’illegal.
    Cependant les memes qui truffent leur discours de « démocratie universitaire », emploient des méthodes dignes de la IV république…ou la majorité sortie des urnes se voit imposer les choix d’une minorité…encore une fois la démocratie universitaire n’est qu’une démocrasseuse
    Il fallait siéger et faire etat de son opposition et ensuite il y aurait eu vote. et il n’est alors pas certain que l’executif aurait obtenu un vote positif

  2. romain

    quant à l’ancrage a gauche de la CFDT, pour etre précis il serait preferable d’ecrire a la remorque du PS ou sa courroie de transmission.. entre gauche et PS .il y a plus qu’une nuance du moins lorsque l’on considére le pb vu de Pompey, Longwy a partir de 1983 ou de de Renault Vilvoorde vers 1997