Archives de Tag: Contentieux

1776. Beaumarchais et l’Amérique

1776. Beaumarchais et l’Amérique

Partie 1. Beaumarchais l’Américain. Source. Maurice Lever, in l’Histoire, mensuel 188, mai 1995.

« En 1776, lorsque les colonies d’Amérique proclament leur indépendance, elles ont dans la vieille Europe des monarchies un partisan éclairé : Pierre Augustin Caron de Beaumarchais, qui n’hésita pas, pour faire triompher leur cause, à se transformer en agent secret, chef d’entreprise, marchand d’armes, armateur, stratège, et surtout infatigable propagandiste de la cause démocratique…

De Français que j’étais, je me fis Américain, négociant, politique, armateur, écrivain (Beaumarchais au Congrès des États-Unis, 14 juillet 1783).

J’ai vécu deux cents ans !  plaisantait un jour Beaumarchais. Il n’en fallait pas moins à ce Protée des temps modernes. Qu’on en juge. Horloger à vingt ans, le voici peu après professeur de harpe ; puis, tour à tour, compositeur de vaudevilles, spéculateur et homme d’affaires, auteur dramatique, magistrat, plaideur, pamphlétaire, agent secret, armateur, marchand de canons, éditeur, et j’en passe . Aventurier par nature, libertin par inclination, financier par amusement, au demeurant bon père et ami fidèle, il est par-dessus tout homme d’esprit, d’une gaieté intarissable et d’une bienveillance universelle, malgré ses nombreux ennemis. On s’émerveille de le voir conduire tant d’affaires à la fois. On s’étonne de son aisance à passer de l’une à l’autre »…

Partie 2. Beaumarchais et les Insurgents d’Amérique. Source : André Lebois, Annales de Bretagne et des pays de l’Ouest, Année 1977, 84-3, pp. 173-182. Fait partie d’un numéro thématique : De l’Armorique à l’Amérique de l’indépendance.

« Les études du duc de Castries ou l’énorme Beaumarchais de Grendel (Flammarion, 1973) ont renouvelé la biographie de Pierre-Augustin, qui ne fut auteur dramatique qu’incidemment ; mais, bien davantage, pamphlétaire et agent secret de renseignements, très utile à la Couronne. La révolte des Insurgents contre George III et ses langoustes rouges (Red Lobsters), qu’il avait prévue dès le traité de 1763, lui permit de jouer un rôle dans la difficile alliance de Louis XVI avec la jeune République fédérale. Par des rapports instructifs, obstinément envoyés à Londres, où il est censé rechercher des libelles diffamatoires, Beaumarchais persuade Vergennes, puis le roi, de la nécessité d’aider les Américains, qui seraient ensuite tenus de protéger nos « îles à sucre » : Guadeloupe, Martinique, Saint-Domingue.

D’abord clandestinement, il arme des navires, fait passer des officiers volontaires (La Fayette, Rochambeau, La Rouerie) ; approvisionne les troupes de Washington en hommes, canons et ravitaillement. Il ne fera pas fortune dans ces tractations, car le Congrès ne peut, ou ne veut pas, payer ; mais il y recueillera les fruits d’une immense publicité, et d’une grande popularité. Les Mémoires qu’il adresse au roi témoignent d’indéniables qualités politiques. Déiste rationaliste, Beaumarchais plaide la cause d’opprimés divers (Caraïbes, Noirs, protestants) ; son idéal humanitaire n’est pas différent de celui de Franklin, ni de la franc-maçonnerie qui s’organise dans le Vieux et le Nouveau Monde. Il a même contribué à l’embellissement des villes-champignons, en envoyant outre-Atlantique Houdon ou L’Enfant, qui bâtit la Maison-Blanche et le Capitole à Washington. Les années 1775-1785 ont pu être qualifiées de décade triomphante, dans la vie tumultueuse et sans entractes du père de Chérubin et de Figaro — Pierre-Augustin Caron — ou Carillon, comme prétendait le chevalier d’Eon.

Bien avant 1775, sa conviction était faite. L’Amérique puritaine allait rompre avec Merry old England et l’emporterait, dans le conflit inévitable. Avait-il médité le rapport de Favier ? Jean-Louis Favier (Toulouse, 1711-1784), fils du syndic général des Etats du Languedoc, syndic lui-même, passé dans l’administration, puis la diplomatie secrète, de Louis XV, intrigua contre Choiseul (avec Mme du Barry), fut désavoué par le roi, et… embastillé. Dès la chute du Canada français (1759), Favier avait adressé, sur ordre, un mémoire à Choiseul. Ce ministre (mort en 1785) me dit avoir lu au feu Roy, un extrait, à la même époque  — Beaumarchais avait alors vingt-sept ans — . L’essentiel en était qu’après la perte du Canada et de la Louisiane, les « treize colonies » n’avaient plus rien à craindre de la France, contre laquelle Washington faisait le coup de feu avec succès, depuis le 26 mai 1754, qu’il tua son premier Français. Mais tout, de l’Angleterre, qui voudrait se dédommager des frais de la guerre de Sept Ans. Jalouses du statut octroyé par la Couronne aux Français catholiques du Canada — le Québec Act tolérait langue et religion — les colonies intraitables sur leur droit de n’être jamais taxées sans représentants entreraient en rébellion, suivie d’une révolution républicaine, plus funeste à l’Angleterre, si l’on intervenait à temps, que ne l’aura été pour la France la perte totale du continent de l’Amérique.

Beaumarchais a longtemps convoité (de loin!) l’héritage d’une jeune créole, Pauline Lebreton : un vaste domaine à Saint-Domingue. La traîtresse épouse, en 1765, le chevalier de Séguirand. Mais tout ramène notre informateur à Londres... Vous savez l’anglais ? — Je sais Goddam ; et, avec Goddam, on va loin. Il traque, en 1774, un libelle sur la stérilité de Louis XVI. Il se renseigne, et renseigne sur tout ; sur l’exil du duc de Gloucester, frère du roi, favorable aux Insurgents ; connaît Lord Rochford, confident du premier ministre, qui est maintenant North, après Grenville, Rockingham et le premier William Pitt. Il fréquente John Wilkes (1727-1797), un pittoresque agité dont son roi n’appréciait pas le journal North Briton, fondé en 1762 ; refoulé sur la France, Wilkes y rencontrait Diderot, d’Holbach, peut-être déjà Beaumarchais, qui le retrouvera lord-maire en 1774. Beaumarchais conquiert, quoique plaideur blâmé et frappé de mort civile, l’estime du prudent Vergennes, lequel finit par persuader Louis XVI, malgré Lord Stormont, ambassadeur d’Angleterre, qui couvre Figaro de boue. La calomnie, Monsieur »…

Partie 3. Mylne Vivienne, compte-rendu du livre de Frédéric Grendel, Beaumarchais ou la calomnie, Dix-Huitième Siècle, Année 1974, 6, p. 412. Fait partie d’un numéro thématique : Lumières et Révolution.

Poster un commentaire

Classé dans AA. Histoire 18ème siècle, C. Outre-Mer, E. Droit et Sciences politiques, E. Mobilité internationale

1763. Rêver une Amérique française

1763. Dernière année de la guerre de Sept ans : les vainqueurs sont les anglais, les vaincus sont les français (perte du Canada). La Guyane devient le dernière rêve de l’Amérique française.

Suite de la chronique 24 décembre 1770. Choiseul exilé. La décision de Choiseul, en 1763, de créer en Guyane une colonie idéale aboutira à un échec retentissant (17 000 morts en deux ans). Il aurait été logique de compter ce fiasco comme facteur de disgrâce du puissant ministre de Louis XV. Ce ne fut pas le cas.

Partie 1. La Guyane, le dernière rêve de l’Amérique française. Source : ouvrage de Marion F. Godfroy, éditions Vendemiaire*, 2014, 318 pages.

« Créer en Guyane une colonie idéale. Des milliers d’hommes, de femmes et d’enfants parcourant à pied  les routes de France d’est en ouest pour arriver au port de la Rochelle et de là embarquer pour Cayenne : c’est l’extraordinaire aventure que mit en œuvre, en 1763, le duc de Choiseul, dans l’idée de faire pièce à la domination anglaise outre atlantique, et de créer en Guyane une colonie idéale d’où serait banni l’esclavage…

Une histoire de rivalités internationales, entre la France et l’Angleterre, victorieuse de la guerre de Sept ans et triomphante en Amérique du nord. Une histoire de clans concurrents dans l’orbite du pouvoir, de faveur et de disgrâce, Turgot contre Choiseul, et d’un idéal des Lumières dévoyé.

Bilan : 17 000 morts« .

Partie 2. Les Jésuites en Guyane à partir de 1668. Deux sources :

« Présentation générale des résultats des interventions archéologiques conduites à Loyola, une habitation exploitée par les jésuites en Guyane, à partir de 1668 et jusqu’à leur interdiction en 1763. L’habitation Loyola, située à Rémire, à 10 km de Cayenne, couvre une superficie d’un peu plus de 1 000 hectares. Jusqu’à 500 esclaves y travaillèrent à produire des biens dont les revenus finançaient le grand projet des religieux en Amérique : l’évangélisation des Amérindiens par le biais des missions. Cet établissement illustre, de façon éloquente, la relation particulière qu’entretint l’église catholique avec le système esclavagiste.

Historique de cette habitation et de la place qu’occupaient les missionnaires dans cette aventure coloniale. Les recherches ont mis au jour la maison de maître et ses dépendances, la chapelle et le cimetière, une forge, une poterie, une manufacture sucrière complète (moulins, chaufferie, purgerie et étuve) une caféterie, une indigoterie… Un très abondant mobilier céramique, verrier et métallique a été recueilli au cours des opérations archéologiques ; il permet de préciser les conditions de vie et les relations commerciales de cette habitation, exceptionnelle par ses dimensions mais représentative de l’économie coloniale à cette époque.

Une entreprise de mise en valeur du site est actuellement engagée, elle vise à révéler au public un lieu illustrant, de façon éloquente, la mémoire de l’esclavage en Guyane ».

Partie 3. Histoire de la Guyane au 18ème siècle. Source : extraits de l’article de Wikipédia.

« En 1713, le traité d’Utrecht considère le fleuve Maroni comme la frontière ouest de la Guyane française. Par ce traité, le roi Louis XIV abandonne totalement le bassin de l’Amazone aux Portugais, mais la difficulté à fixer les frontières géographiques en Amazonie va être la source de disputes durant deux siècles. Les deux parties ne cessent de rechercher l’extension de leur territoire respectif par l’installation de postes militaires, de missions religieuses et de comptoirs commerciaux. Ces disputes se termineront en 1900 par un arbitrage suisse qui fixe la frontière entre le Brésil et la France.

Vers 1750, de nombreux Amérindiens s’installent sur le territoire.

En 1762, les Jésuites sont expulsés de la Guyane sur ordre de Louis XV : l’expulsion précède l’implantation en Guyane par la volonté du ministre français Choiseul d’une nouvelle colonie de peuplement ; des milliers de personnes sont envoyées de France pour accélérer de manière décisive la colonisation des terres. Cette politique volontariste échoue car rien n’a été préparé pour les accueillir.

En 1763, une campagne de propagande principalement menée en Alsace et en Lorraine conduit environ 15 000 Français dont 12 000 Alsaciens et Lorrains vers le port de Rochefort, à destination des savanes de l’Ouest guyanais. En effet, après la perte du Québec, Choiseul veut faire de la Côte Sauvage une nouvelle colonie de peuplement afin de réaffirmer la position française en Amérique.

Choiseul, qui s’imagine la Guyane comme un paradis luxuriant, a une méconnaissance totale du terrain. Le projet colonial est réalisé dans l’approximation. Les colons, dont un certain nombre est déjà malade sur le bateau surpeuplé, débarquent à Kourou en pleine saison des pluies et dans les marais. 12 000 colons meurent dans l’année de maladies (dysenterie, fièvre jaune, syphilis, paludisme). L’expédition, menée par Choiseul, est un cuisant échec, le paradis guyanais se transforme en enfer. Une soixantaine de familles de survivants au désastre de Kourou se réfugient sur le petit archipel en face de Kourou, baptisé Îles du Salut pour l’occasion, avant de retourner en France.

En 1776, un gouverneur compétent est enfin nommé. Pierre-Victor Malouët, secondé par l’ingénieur Joseph Guisan, d’origine suisse, entreprend un programme de réforme de l’agriculture et d’aménagement de territoires agricoles. Le territoire va connaître une période de relative prospérité jusqu’à la Révolution française.

À partir de 1792, la Révolution fait de Cayenne un lieu de déportation pour les prêtres réfractaires et les ennemis politiques de la Révolution. Le premier bagne, celui de Sinnamary, est créé. Jusqu’en 1805, le territoire est un lieu de déportation pour les opposants politiques aux différents régimes qui se succèdent en France.

En 1794, la République Française abolit l’esclavage mais remplace les esclaves par les religieux français et belges. C’est le conventionnel André Pomme, premier député de Guyane, qui est à l’origine du projet de déportation des religieux français et belges ».

Partie 4. Guyane Française, Données historiques. Source : université Laval.

« Après 1763, la Guyane était demeurée française à la faveur d’une violente tempête qui avait empêché les Britanniques de s’en emparer. Elle restait donc sur la liste des rares colonies françaises à développer. La perte du Canada pouvait être compensée en quelque sorte par la colonisation de la Guyane. Le duc de Choiseul voulait en faire un nouveau Canada sous le nom de France équinoxiale, parce que la durée des jours et des nuits y reste approximativement la même tout au cours de l’année ».

Poster un commentaire

Classé dans AA. Histoire 18ème siècle, AF. Histoire 16-17èmes siècles, C. Grand-Est (Alsace Lorraine Champagne-Ardenne), C. Outre-Mer, D. Allemagne, E. Agriculture, E. Ingénierie, Architecture, E. Mobilité internationale, E. Sciences humaines et sociales

24 décembre 1770. Choiseul exilé

1770 (24 décembre). Disgrâce de Choiseul.

24 décembre 1770  : disgrâce de Choiseul. Source : 1770 en France. « Les coteries de cour ont un rôle dans cette disgrâce : les dévots réunissant les filles du roi, La Vauguyon, précepteur du Dauphin, d’Aiguillon, hostiles aux parlements, aux idées éclairées, à l’alliance autrichienne, s’opposent aux Choiseulistes.

Choiseul, exilé sur son domaine de Chanteloup (Touraine), y crée un foyer actif d’opposition. Début du triumvirat du duc d’Aiguillon, de l’abbé Terray et de Maupeou. Louis XV s’efforce, avec le chancelier Maupeou de restaurer l’absolutisme et de poursuivre la politique de réforme fiscale.

Partie 1. Choiseul. L’obsession du pouvoir. Source : Monique Cottret, Éditions Tallandier, 2018, 509 pages.

La chute de Choiseul, grand ministre de Louis XV. Source. Franck Ferrand interviewe Monique Cottret, Europe 1, récit intégral, 42 minutes 12, 4 avril 2018.

Partie 2. Étienne François de Choiseul. Source : extraits de l’article de Wikipédia

« Choiseul, progressivement à partir de la mort de madame de Pompadour en 1764, doit utiliser de manière permanente son habileté à maintenir son pouvoir et son influence sur Louis XV, tant celui-ci était l’objet de stratégies concurrentes pour supplanter l’influence du ministre. Par le moyen de la faveur royale, les coteries et autres clans investissaient en utilisant le moyen d’intrigantes, rêvant pour la plupart à un destin similaire à celui de madame de Pompadour. Choiseul sans cesse écrivit à Louis XV pour devancer les attaques et éviter la disgrâce.

L’autre stratégie déployée par Choiseul était de prévenir de manière raffinée les attaques d’intrigantes, jouets, pour la plupart, des diverses coteries de la cour de Versailles. Ce fut le cas dans l’affaire de madame d’Esparbès : cette dernière, parente de Mme de Pompadour, accordait ses faveurs à de nombreux princes, dont Louis-Henri-Joseph, prince de Condé, puis, Mme de Pompadour étant absente, au roi lui-même. À la mort de la Pompadour, le 15 avril 1764, Louis XV réserva à Mme d’Esparbès un appartement à Marly et un autre à Versailles, au point de la faire presque passer pour sa maîtresse déclarée. Choiseul tenta de lui substituer la duchesse de Gramont, qui avait 34 ans et était de son clan ».

« Les Rohan-Soubise soutinrent quant à eux Mme d’Esparbès qui semblait bien devoir triompher, lorsqu’au printemps 1766, Choiseul introduit dans l’intimité de cette dernière une amie infidèle, qui l’interroge sur ses rapports avec le roi, et obtient des confidences scandaleuses qui furent publiées par les nouvellistes. Le roi, informé par Choiseul, donna sur-le-champ ordre à Mme d’Esparbès de se retirer auprès de son mari.

Après la mort de madame de Pompadour, le duc de Choiseul caressait l’espoir de placer auprès du roi sa sœur, la duchesse de Gramont, ou toute autre femme à leur dévotion. Aussi les Choiseul n’accueillirent-ils pas d’un bon œil l’ascension de la nouvelle favorite Mme Du Barry, qui leur fit perdre une part d’influence auprès du roi. Une créature du clan Choiseul, Pidansat de Mairobert, fut le rédacteur des premières attaques, souvent triviales contre Mme Du Barry. Il suscita des chansons grivoises et même des libelles pornographiques (L’Apprentissage d’une fille de modes, ou L’Apothéose du roi Pétaud).

Par la force des choses, Mme Du Barry se retrouva soutenue par le parti dévot, par le fait même qu’il était hostile à Choiseul qui, pour avoir conclu le mariage du nouveau Dauphin Louis-Auguste et de l’archiduchesse Marie-Antoinette d’Autriche, semblait encore intouchable (on pensa même régulariser la situation en la faisant officiellement épouser par le roi). Prévenue contre Mme Du Barry dès son arrivée en France en mai 1770 (chronique du blog Goethe et Marie-Antoinette, la dauphine, jeune et entière, lui voua d’emblée un mépris profond en ne lui parlant pas, ce qui était grave quand on vivait à la cour, moins parce qu’elle était favorite royale que parce qu’elle était non agréée par le parti lorrain de la cour (1770).

Membre de la commission pour la réforme fiscale de L’Averdy, l’abbé Terray est remarqué par René-Nicolas de Maupeou, qui le fait nommer contrôleur général des finances en décembre 1769. Terray l’aide à se débarrasser de Choiseul et de son cousin Choiseul-Praslin, le 24 décembre 1770.

Sa disgrâce se dessine progressivement. L’affaire d’Aiguillon-La Chalotais mécontente Louis XV sur l’orientation libérale de son ministre dont la pratique politique s’apparentait à une cogestion implicite avec les adversaires de la monarchie absolue.

La connaissance d’une négociation menée secrètement par Choiseul avec Charles III d’Espagne pour une reprise de la guerre contre l’Angleterre, guerre dont le roi ne voulait pas, accéléra la disgrâce du ministre à la fin de 1770.

À cette première cause idéologique s’ajoute une raison liée à l’intimité de Louis XV. Ses ennemis, menés par la comtesse du Barry, maîtresse du roi, et le chancelier Maupeou, eurent raison de lui. Ce dernier se rapproche en effet du clan du Barry et dénonce au Roi la politique de soutien de Choiseul envers les parlementaires. Courroucé, le Roi le fut davantage encore en voyant le duc de Choiseul travailler à susciter une guerre au dehors.

Un incident met un comble à l’indignation royale : le roi et Choiseul se rencontrent dans la galerie des glaces alors que le ministre était suivi d’un cortège à la tête duquel il semblait être un souverain, tandis que Louis XV à peine accompagné semblait un souverain en disgrâce. Cette circonstance décide de la chute de Choiseul, représenté aussitôt comme osant se présenter pour rival du souverain.

A la suite d’humiliations répétées contre Mme Du Barry Louis XV décide le renvoi de Choiseul et des siens, et le fait remplacer par le duc d’Aiguillon.

Le neveu du duc d’Aiguillon remet au duc de Choiseul une lettre par laquelle le Roi l’exilait non seulement avec dureté mais de manière menaçante. Le 24 décembre 1770, Choiseul recevait cette lettre du roi : mon cousin, le mécontentement que me causent vos services me force à vous exiler à Chanteloup, où vous vous rendrez dans vingt-quatre heures. Je vous aurais envoyé beaucoup plus loin, si ce n’était l’estime particulière que j’ai pour Mme la duchesse de Choiseul, dont la santé m’est fort intéressante. Prenez garde que votre conduite ne me fasse prendre un autre parti ; sur ce, je prie Dieu, mon cousin, qu’il vous ait en sa sainte garde. Il reçut l’ordre de se retirer dans son château de Chanteloup près d’Amboise.

En 1771, il doit démissionner de sa charge de colonel général des Suisses. Comme l’écrivit un chroniqueur :  jamais un ministre au faîte de la faveur et de la puissance ne fut aussi triomphant que le duc de Choiseul dans sa disgrâce. Malgré tout, le roi Louis XV conserva une haute opinion de Choiseul ; apprenant le démembrement de la Pologne, il s’écria : ah ! Cela ne serait pas arrivé, si Choiseul eût été encore ici. L’impératrice Marie-Thérèse, après avoir formellement déploré cette situation, se satisfît parfaitement du duc d’Aiguillon, qu’elle jugea doué de peu de génie et de talents, sans crédit et harcelé sans cesse par des factions.

Durant son bannissement, Choiseul fut visité par des personnages puissants et apparut comme un véritable chef de l’opposition. Le duc de Choiseul, exilé à Chanteloup, y avait toute la France, observe l’abbé Morellet en 1773. Les libelles fleurirent. Au mois de juillet 1773, Théveneau de Morande, devenu une des créatures du clan Choiseul, s’attaqua alors à la favorite royale, Madame du Barry. Le lieutenant général de police Sartine fait alors perquisitionner les libraires pour connaître l’éditeur. Finalement Théveneau est localisé à Londres, son arrestation échoue et c’est Beaumarchais qui est envoyé, début 1774, pour négocier avec le libelliste. La même année, lors de la constitution du gouvernement de Louis XVI, questionné sur le choix des ministres, Choiseul répond alors : « je ne vois que le comte de Vergennes pour les affaires étrangères ». En effet, malgré ses différends avec Vergennes, celui-ci, issu du courant traditionnel diplomatique du cardinal Fleury, peut être considéré comme le continuateur de la politique de redressement de Choiseul.

Marie-Antoinette considère d’un très mauvais œil le départ de Choiseul, auquel elle pensait devoir son mariage. Pendant toute sa disgrâce, elle lui témoigna une grande fidélité et le fait rappeler à l’avènement de Louis XVI, le 10 mai 1774, lui donnant une audience à Reims au moment du sacre. Cependant, Louis XVI ne pardonnait pas à Choiseul de s’être vivement opposé à son père, le dauphin Louis, à propos de l’expulsion des Jésuites, en 1764, à tel point que lorsque le Dauphin mourut en 1765, le bruit des opposants fit courir la rumeur que Choiseul l’avait fait empoisonner.

Le nouveau  roi, cédant aux instances de la reine, lui permet toutefois de revenir à Paris. Il paraît de nouveau à la Cour dès le 12 juin 1774, mais à cette date, Maurepas domine le Conseil et Vergennes occupe le secrétariat d’État aux Affaires étrangères.

Louis XVI lui réserve un accueil maussade, se bornant à lui dire : Monsieur de Choiseul, vous avez perdu une partie de vos cheveux. Choiseul comprend qu’il n’a plus rien à espérer et repart dès le lendemain pour Chanteloup où il meurt onze ans plus tard, en 1785″.

Partie 3. Disgrâce de Choiseul, in Guy Chaussinand-Nogaret, Choiseul, 1998, pages 289 à 304.

« Pour renverser Choiseul, le parti Maupeou fit choix de deux arguments ou plutôt de deux assertions mensongères, fondées sur des ragots et de faux témoignages, mais susceptibles de faire impression sur le roi qui se laisserait aisément persuader qu’un danger imaginaire le guettait et du moins que sa tranquillité, aspiration dernière de ce vieillard pusillanime, était menacée en même temps que l’idylle dubarrienne, devenue l’obsession sénile de ses dernières années.

Poster un commentaire

Classé dans AA. Histoire 18ème siècle, C. Ile-de-France

Choiseul, 40 ans en 1759

Choiseul (1719-1785), 40 ans en 1759

Choiseul, membre de la Noblesse, a été immensément riche tout au long de sa vie. Destiné à une carrière militaire, il n’y fait pas un parcours particulièrement brillant. Il se tourne alors vers la carrière politique (ambassade de Rome puis de Vienne). Il est proche de Madame de Pompadour. Il remplace Bernis comme principal Ministre d’État du roi Louis XV, le 2 décembre 1758, au cœur de la guerre de Sept ans (1756-1763). Il demeure dans cette fonction-clé jusqu’en 1770. 1758-1770 : une durée exceptionnelle au 18ème siècle. Classique également la suite et la fin : il est exilé dans son château de Chanteloup.

Deux sources principales. Chapitres 1 et 2 du livre de Monique Cottret, Choiseul. L’obsession du pouvoir, Tallandier, 2018, 508 pages.

Extraits de l’article de Wikipédia

Comte puis duc de Choiseul-Stainville (1758) et duc d’Amboise (1764), est né le 28 juin 1719 à Nancy et mort le 8 mai 1785 au château de Chanteloup. Il fut le chef du gouvernement de Louis XV entre 1758 et 1770.

Il était préoccupé par la modernisation de l’État et son renforcement face au pouvoir de l’Église, symbolisant l’alliance sociologique et politique entre une frange libérale de la noblesse européenne et la bourgeoisie progressiste d’affaires, tout comme William Pitt en Grande-Bretagne, Pombal au Portugal, Tanucci à Naples, Du Tillot à Parme et Kaunitz en Autriche.

Il est le fils aîné de marquis François Joseph de Choiseul-Beaupré de Stainville, qui avait 30 000 livres de rente et se livrait au plaisir de la bonne chère, sa passion dominante.

Son frère cadet Jacques Philippe de Choiseul, se consacre à la carrière militaire, tandis que sa sœur, Béatrix de Choiseul-Stainville, duchesse de Gramont, que le duc passait pour aimer d’une affection plus que fraternelle ; celle-ci fut amie de Mme de Pompadour, est une salonnière et bibliophile, aux manières libres et brusques, une femme impérieuse et tranchante, qui a de l’influence sur Étienne François, ce qui a favorisé sa carrière politique.

Sujet du duc Léopold Ier de Lorraine, Étienne-François reçoit les prénoms du fils du duc.

1738 (19 ans). Le Traité de Vienne (1738) donnant la Lorraine et le Barrois à Stanislas Leszszynski, beau-père du roi de France, le duc François III Étienne reçoit en compensation le grand-duché de Toscane et nomme le jeune Choiseul Ministre de Toscane auprès de la cour de France.

1741 (22 ans). Choiseul participe aux campagnes de Bohême en 1741 et d’Italie, notamment la bataille de Coni, pendant la guerre de Succession d’Autriche, dans le régiment de Navarre.

1743 (24 ans). Après la défense du Rhin et la campagne de Flandre, il est promu sous-lieutenant (1739), colonel (1743), puis brigadier et maréchal de camp.

1745 à 1748 (26 à 29 ans). Il est aux Pays-Bas pendant les sièges de Mons, Charleroi et Maastricht et atteint le rang de lieutenant général.

1750 (31 ans). Il fait partie, avec le roi Stanislas Leszczynski, des membres fondateurs de l’Académie de Stanislas à Nancy

1750. Le 22 décembre, Choiseul épouse Louise Honorine Crozat, fille de Louis François Crozat, et petite-fille d’Antoine Crozat, première fortune de France sous Louis XIV. Elle lui apporte 120 000 livres de rente et l’hôtel Crozat, construit en 1706 par Cartault pour Pierre Crozat, grand-oncle de l’épousée.

1753 (34 ans). Brièvement bailli des Vosges, il devient en juillet 1753 maréchal de camp en Flandre, sous les ordres du prince de Soubise.

1753-1757 (34-38 ans). À son retour, en octobre, une lettre du maréchal de Noailles l’informe que le duc de Nivernais quitte l’ambassade de Rome. Choiseul est nommé à sa place.

1756 (37 ans). Il reçoit le cordon bleu du Saint-Esprit, convoité depuis sa nomination comme ambassadeur.

1756. Mais il ne se presse guère pour faire son entrée officielle (avril 1756) dans la fonction d’ambassadeur de Louis XV à Rome auprès de Benoit XIV, pape de 1740 à 1758.

Il mène les négociations concernant les troubles provoqués par la résistance janséniste à la bulle papale Unigenitus. Cette difficile question qui divise sévèrement le royaume de France conduit Benoit XIV à chercher une solution acceptable dans l’encyclique Ex omnibus Christiani orbis. L’autorité de la papauté, progressivement réaffirmée après la crise conciliariste, doit être maintenue.

Diaporama de 5 photos. Ex Omnibus ou la revanche des « Vieillards » (extraits du livre de Monique Cottret)

Pour aller plus loin : article en ligne. L’ecclésiologie de Benoît XIV. Olivier Descamps, pp. 309-322, in Les Clercs et les Princes, Publications de l’École nationale des Chartes

Poster un commentaire

Classé dans AA. Histoire 18ème siècle, D. Italie, E. Sciences humaines et sociales

Mme de Pompadour. Guerre de 7 ans

Madame de Pompadour et la guerre de 7 ans (1756-1763).

Sources. Edmond Dziembowski, La guerre de  Sept ans (1756-1763), Pour l’Histoire, Perrin, Ministère de la Défense, janvier 2015, 670 pages.

Louis XV et Madame de Pompadour. Youtube : 50 minutes

Née à Paris le 29 décembre 1721, Madame de Pompadour a 34 ans au début de la  guerre de 7 ans.

Elle est la maîtresse en titre de Louis XV de 1745 à 1751. Après cette période, elle demeure amie et conseillère du roi.

Le 7 février 1756, le roi annonce sa nomination comme Dame du palais de la Reine et la présentation a lieu le lendemain.

Elle reste auprès de lui jusqu’à sa mort le 15 avril 1764, au château de Versailles.

Les sources mobilisées dans cette chronique dressent un portrait très contrasté et vont même jusqu’à ignorer son existence (partie 1). Les Goncourt en 1888 critiquent impitoyablement ses origines non nobles (partie 3). Pour Jean Beranger, historien contemporain, « Madame de Pompadour joua, dans le renversement des alliances, un rôle discret, mais efficace » (partie 2).

Madame de Pompadour par François Boucher, 1759

Partie 1. Aucune mention d’un rôle joué par Madame de Pompadour

La révolution diplomatique de 1756 : une négociation au sein de l’État royal, Lucien Bély, Books openedition, Expériences de la guerre, pratiques de la paix, Presses universitaires de Rennes, pp. 149-167.

« Nous voyons s’élaborer un discours de substitution qui vient transformer les justifications habituelles de la politique extérieure de la France, sous la pression des événements et de décisions prises dans l’urgence. Cela exige une négociation au cœur même de la sphère gouvernementale, avec l’obligation de concilier des idées contraires, dans une réconciliation inattendue avec un ennemi traditionnel (la dynastie des Habsbourg). Il y a à la fois une évolution lente des conceptions politiques et une réaction face à la situation présente. Le discours royal retrouve quelques références stables : la logique dynastique, la convergence religieuse, la société des princes, l’union des puissances. Mais les risques apparaissent aussi clairement, d’où d’infinies précautions. Si le système ancien est renversé, si un nouveau système d’alliance se dessine, la sagesse diplomatique vient se rappeler à l’audace des princes ».

Partie 2. « Madame de Pompadour joua, dans le renversement des alliances, un rôle discret, mais efficace« 

Analyse d’un historien contemporain, Jean Bérenger, professeur émérite à l’université de Paris IV-Sorbonne. Le traité de Versailles et le renversement des alliances Versailles, 1er mai 1756, Source : France archives, Commémorations Collection 2006.  

« Le traité de Versailles du 1er mai 1756, qui concluait une alliance offensive et défensive entre la France et la monarchie autrichienne, a profondément modifié l’équilibre européen jusqu’à la Révolution française. Connu comme le renversement des alliances, il représente en effet un événement historique pour l’Europe des Lumières. Au système diplomatique en vigueur depuis la fin du règne de Louis XIV, qui plaçait la monarchie autrichienne et la Grande-Bretagne dans un camp, la France, la Prusse et la Bavière dans le camp adverse, se substitue désormais une alliance anglo-prussienne s’opposant à une alliance franco-autrichienne.

Le renversement des alliances permettrait surtout, croyait-on à Versailles, d’empêcher l’expansion coloniale anglaise en laissant à la France toutes ses forces disponibles outre-mer, au moment où les relations franco-anglaises en Amérique du Nord ne cessaient de se détériorer.

L’initiative diplomatique est néanmoins venue de l’impératrice Marie-Thérèse qui, après les affrontements de la guerre de succession d’Autriche, fit de l’alliance française le pilier de son nouveau système diplomatique. À Vienne, Kaunitz, qui avait négocié la paix d’Aix-la-Chapelle, ne cacha pas les avantages d’un rapprochement avec les Bourbons : la France pourrait rester neutre en cas de guerre austro-prussienne, inévitable si Marie-Thérèse voulait récupérer la Silésie.

La mission de Kaunitz, ambassadeur d’Autriche en France de 1750 à 1753, avait été une réussite, car il sut à la fois gagner Mme de Pompadour et déjouer l’hostilité des ministres français, qui demeuraient attachés à l’alliance prussienne. Rappelé à Vienne, Kaunitz fut nommé chancelier d’État et dirigea pendant 40 ans la diplomatie autrichienne. À ce moment l’impératrice Marie-Thérèse, qui voulait à tout prix reconquérir la Silésie, avait compris que la Grande-Bretagne, qui l’avait obligée à céder cette province à la Prusse en 1745, ne l’y aiderait jamais. Or, elle n’osait pas attaquer la Prusse, si elle ne disposait d’aucune aide et si elle n’était pas assurée de la neutralité de ses voisins.

Starhemberg, successeur de Kaunitz à Paris, avait reçu dès 1755 des instructions précises pour négocier un traité d’alliance défensif avec la France. Les ouvertures de Marie-Thérèse furent bien accueillies par le roi et Mme de Pompadour qui joua, dans le renversement des alliances, un rôle discret, mais efficace. Pendant près d’un an, Starhemberg mena avec l’abbé de Bernis de longues et difficiles conversations secrètes, car il ne fallait pas éveiller les soupçons du ministère, foncièrement anti-autrichien.

C’est alors que Frédéric II accomplit le geste qui devait tout déclencher. Par le traité de Westminster du16 janvier1756, il manifesta son rapprochement avec la Grande-Bretagne, en s’engageant à ne pas attaquer le Hanovre, qui appartenait au roi d’Angleterre. Même si Frédéric II n’avait pas l’intention d’abandonner l’alliance française, l’alliance prussienne n’était plus d’aucune utilité pour Louis XV, au cas où le roi de Prusse refuserait d’attaquer le Hanovre.

Le résultat de la volte-face prussienne fut le traité de Versailles du 1er mai 1756. Celui-ci garantissait la neutralité des Pays-Bas autrichiens, les possessions réciproques des parties contractantes et prévoyait une aide militaire au partenaire sous forme d’un corps auxiliaire de 24 000 hommes ou d’une aide financière permettant l’entretien d’un effectif équivalent. Marie-Thérèse ratifia le traité dès le 25 mai, mais l’accord demeurait fragile car il choquait profondément l’opinion française et déplaisait aux ministres de Louis XV, Machault d’Arnouville et d’Argenson. Choiseul lui-même, partant en qualité d’ambassadeur à Vienne, ne s’était pas gêné pour montrer tous les inconvénients de l’alliance.

Un second traité fut signé à Versailles le 1er mai 1757 par le nouveau ministère qui, composé de Belle-Isle à la Guerre, de Silhouette au contrôle général des Finances et de l’abbé de Bernis aux Affaires étrangères, était favorable à l’alliance autrichienne. Louis XV promettait de fournir une armée de 130 000 hommes, de verser à Marie-Thérèse un subside annuel de 12 millions de florins (soit 12 millions d’écus) jusqu’à ce que Frédéric II ait restitué à l’Autriche la Silésie. Louis XV versa en fait à Marie-Thérèse pendant plusieurs années 25 à 30 millions de livres tournois, sans lesquels les Impériaux n’auraient pu fournir un gros effort de guerre en Bohême et en Silésie. C’était pour Kaunitz un triomphe diplomatique, qui ne permit pourtant pas à Marie-Thérèse de récupérer la Silésie à la fin de la guerre de Sept ans.

Tout le projet reposait sur une analyse erronée des capacités de résistance de Frédéric II, qui fit face à une vaste coalition continentale regroupant la Russie de la tsarine Élisabeth Petrovna, la Saxe et la Pologne d’Auguste III, la Suède, la France, la monarchie autrichienne et le Saint-Empire, qui avait déclaré la guerre à Frédéric II à la suite de l’agression prussienne contre la Saxe. Si la guerre de Sept ans se traduisit pour la maison de Brandebourg par un véritable « miracle », dont Frédéric II était parfaitement conscient, elle se révéla pour  Louis XV une opération désastreuse, car la France accumula les défaites sur terre et sur mer. Elle eut en effet à combattre sur deux fronts, sans autre but de guerre que d’aider Marie-Thèrèse, alors qu’elle était engagée dans un conflit maritime et colonial.

L’alliance franco-autrichienne de 1756 permit néanmoins la réconciliation des maisons de Bourbon et de Habsbourg-Lorraine même si, de part et d’autre, de vieilles rivalités demeuraient. Elle a en outre apporté un demi-siècle de paix à la Rhénanie, aux Pays-Bas autrichiens, à l’Italie du Nord et aux provinces françaises du Nord-Est et a facilité l’essor économique et culturel de ces régions au cours de la seconde moitié du XVIIIe siècle ».

Partie 3. Madame de Pompadour, La femme implacable

Source. Edmond & Jules de Goncourt, Madame de Pompadour, France Empire, 2012, chapitre XVIII, pp . 330 à 341. Réédition de l’ouvrage de 1888.

Commentaires fermés sur Mme de Pompadour. Guerre de 7 ans

Classé dans AA. Histoire 18ème siècle, C. Ile-de-France, E. Droit et Sciences politiques, E. Ingénierie, Architecture, E. Sciences humaines et sociales

Joseph II et le royaume de Hongrie

Joseph II (1741-1790) et le royaume de Hongrie.

Partie 1. Bonnes feuilles du livre de François Fejtö, Joseph II, Un Habsbourg révolutionnaire, Librairie Académique Perrin.

Diaporama. Table des matières du livre et pages dédiées à la Hongrie (287 à 310).

La guerre du latin en Hongrie (pages 287 à 292).

Presbourg est devenue Bratislava, capitale de la Slovaquie, sur le Danube.

La lutte contre les privilèges (pages 293 à 310)

Partie 2. Le royaume de Hongrie (Magyar Királyság) entre 1718 et 1867. Source : extraits de l’article de Wikipédia.

« Le royaume s’élargit, sous l’égide des Habsbourg au terme de leur Longue Guerre contre l’Empire ottoman, de la Hongrie royale aux territoires de la Hongrie ottomane et du Partium transylvain ayant formé le royaume de Hongrie orientale.

L’échec ottoman devant Vienne (1683) détermine les Habsbourg à repenser leurs stratégie en Hongrie royale, remettant en cause la prééminence obtenue en 1568 par les Ottomans dans la plaine hongroise à la paix d’Andrinople.

Les opérations de conquête des Habsbourg à la fin du XVIIe siècle se concentrent autour de la plaine de Hongrie, occupée par les Ottomans depuis le milieu du siècle. Ainsi, dès le dégagement de Vienne, les généraux des Habsbourg planifient une conquête systématique de la plaine hongroise, menée de façon méthodique à partir de 1684. Les années 1684 et 1685 sont ainsi consacrées à la prise des positions indispensables à un succès en Hongrie centrale, Érsekújvár sur la rive gauche du Danube, Esztergom sur la rive droite, succès de faible importante tactique mais d’une grande importance stratégique ».

La cathédrale Saint-Adalbert est un sanctuaire catholique de la ville d’Esztergom. Édifiée à partir de 1822, elle succède à une ancienne cathédrale médiévale ruinée lors d’une bataille contre les troupes ottomanes.

« Après la conquête de Buda en 1686, les opérations se concentrent rapidement autour de la forteresse de Belgrade, conquise par les Impériaux une première fois en 1688, puis perdue en 1690. Rapidement, ces opérations, ainsi que le succès de Buda, sont utilisées par les Habsbourg et leur propagande, dans les années qui suivent, puis au cours du XIXe siècle.

La conquête de la Hongrie par les Habsbourg est entérinée en 1699 par la paix de Karlowitz, et achevée en 1718 au traité de Passarowitz par le rattachement du Banat.

Le XVIIIe siècle est marqué par la grande révolte nobiliaire hongroise de 1711 coïncidant avec l’arrivée sur le trône de la branche féminine de la famille de Habsbourg, en la personne de Marie-Thérèse. Ensuite, aucune révolte d’importance ne se développe entre 1711 et 1790.

Au cours du XVIIIe siècle, les nobles hongrois s’affirment comme les principaux défenseurs de Marie-Thérèse, notamment le 24 septembre 1741 lors de son sacre comme impératrice ; sans leur soutien, les princes allemands intéressés par le dépeçage des possessions des Habsbourg n’auraient laissé à Marie Thérèse que le royaume de Hongrie, le grand-duché de Transylvanie et le grand-duché de Toscane. Par leur soutien à la nouvelle impératrice, les nobles magyars arriment solidement le royaume de Hongrie à la maison des Habsbourg ».

Carte de la Hongrie en 1911

Commentaires fermés sur Joseph II et le royaume de Hongrie

Classé dans AA. Histoire 18ème siècle, AF. Histoire 16-17èmes siècles, BA. Photos, E. Mobilité internationale

Pompidou Metz. La Répétition

Présentation de l’exposition La Répétition. Commissariat, Éric de Chassey, directeur général de l‘Institut national d‘histoire de l‘art.

Autre présentation. Youtube (15 minutes 53)

« En 1936, Marie Laurencin peint le tableau La Répétition. À première vue, rien ne s‘y distingue d‘une scène de genre convenue. Un groupe de jeune femme est assemblé ; l‘une tient un livret pour le chant, une autre une guitare pour la musique, une autre encore esquisse un pas de danse, tandis que les deux autres les regardent. Sans en avoir l‘air, ce tableau n‘est rien de moins qu‘une reformulation des Demoiselles d‘Avignon de Pablo Picasso, l‘une des œuvres inaugurales du modernisme : même rideau qu‘ouvre un des modèles, même nombre de figures féminines dans une composition pyramidale, mêmes rythmes chromatiques – un chien remplaçant au premier plan une nature morte. Sauf que, loin de multiplier les hétérogénéités, tout le tableau est marqué par un principe de redoublement.

La répétition n‘est pas seulement le sujet du tableau (une répétition comme il en faut pour qu‘un spectacle soit réussi), elle est aussi sa méthode, incarnée par le fait que tous les visages sont identiques – un redoublement dans le redoublement ».

Répétitions de Victor Brauner et de Marlène Dumas

Partie 1. Victor Brauner. Monsieur K : diaporama de 9 photos

« Son œuvre est loin d’être insensible au climat politique qui devient de plus en plus alarmant ; l’iconographie de l’artiste roumain se caractérise par son opposition à l’oppression totalitaire, autrement dit fasciste. Dès 1932, L’Orateur montre un mannequin terrifiant, tenant fièrement un drapeau, symbole de la montée du nationalisme et s’adressant à une foule qui l’acclame.

 Cependant, la figure emblématique de l’alliance entre bourgeoisie et tyrannie est Force de concentration de Monsieur K. (1934) , cette version grotesque d’Ubu, le héros de la pièce d’Alfred Jarry. Symbole du délire du pouvoir et de l’absurdité des hiérarchies politiques, le personnage de Brauner, nu et obèse, au corps recouvert de minuscules poupées en celluloïd, dément le dicton selon lequel le ridicule ne tue pas. À la différence de la caricature politique – que le peintre pratique par ailleurs (Hindenburg, 1935-1936). Monsieur K. est une image universelle de l’autorité écrasante, décrite par André Breton comme l’exemple du combat de l’artiste contre toutes les puissances d’asservissement humain. Breton, à qui Brauner fait, dans une lettre de 1940, cette magnifique déclaration : je suis le rêve, je suis l’inspiration ». 

Lire aussi : SurréAlice. Invisible Victor Brauner ?

Biographie et diaporama de 73 photos. Chronique du 23 décembre 2022.

Partie 2. Marlène Dumas. Ressemblances I et II

Diaporama de 8 photos

« Deux corps étendus dans une position similaire, au teint cadavérique, gisent, juxtaposés. Avec Gelijkenis I & II, diptyque de grandeur nature, Marlene Dumas émet une proposition artistique profonde, tant sur la peinture en elle-même que sur notre époque. 

Cette œuvre puissante se réfère explicitement aux codes de la peinture religieuse, plus précisément aux représentations du Christ mort. Elle évoque notamment le tableau de Hans Holbein le Jeune (1497-1543) conservé au Kunstmuseum de Bâle, de son iconographie jusqu’à son format. Ce chef-d’œuvre de la peinture hollandaise montre le Christ entre la descente de croix et la résurrection avec un réalisme cru et morbide. 

Par ce diptyque, peint avec une palette de tons gris, de verts et de bruns, Marlene Dumas nous invite à une réflexion profonde sur la mort, la rédemption et l’histoire de l’art. Cette œuvre a été présentée pour la première fois en 2007 lors de l’exposition Sequence 1 à Palazzo Grassi à Venise ». 

Lire aussi : Marlène Dumas, 30 ans en 1983. Chronique du blog du 27 juin 2015

Biographie et Diaporama de 46 photos.

Commentaires fermés sur Pompidou Metz. La Répétition

Classé dans C. Grand-Est (Alsace Lorraine Champagne-Ardenne), E. Arts Lettres Langues, E. Mobilité internationale, BA. Photos

1er mai. Réforme des retraites, Non !

1er mai 2023. Manifestation à Strasbourg contre la réforme des retraites

Diaporama de 34 photos

La mobilisation contre la réforme des retraites ne faiblit pas, malgré la promulgation de la loi. Je n’avais jamais vu autant de monde défiler un 1er mai. Les jeunes, nombreux et férus de concerts de casseroles. 20 000 manifestants selon Rue 89 Strasbourg.

J’ai aimé ce slogan porté à bout de bras par un manifestant : humour noir (la 1664 de Kronenbourg est fabriquée en Alsace à Obernai).

Travailler de 16 à 64 ans…

Mise en bière assurée

2010 à 2023, manifestations du 1er Mai à Strasbourg. Cliquer ici pour lire les chroniques du blog et regarder les photos.

Commentaires fermés sur 1er mai. Réforme des retraites, Non !

Classé dans BA. Photos, C. Grand-Est (Alsace Lorraine Champagne-Ardenne)

Disgrâce de Bernis (décembre 1758)

Disgrâce du Cardinal de Bernis (décembre 1758).

Partie 1. Le contexte : la guerre de Sept ans. Source. Pages 340-346 du livre d’Edmond Dziembowski, La guerre de  Sept ans (1756-1763), Pour l’Histoire, Perrin, Ministère de la Défense, janvier 2015, 670 pages.

Partie 2. François Joachim de Pierre, cardinal de Bernis. Source : article du Larousse.

« Homme d’État, prélat et écrivain français  (1715-Rome 1794). Protégé par Mme de Pompadour, ambassadeur à Venise (1752), il négocia, à l’instigation de Louis XV, l’alliance franco-autrichienne consacrée par le premier traité de Versailles (1756), qui préluda à la guerre de Sept Ans.

Nommé lors de ce conflit secrétaire d’État aux Affaires étrangères (1757), il s’opposa à la poursuite des hostilités après la défaite de Rossbach (1757), ce qui provoqua sa disgrâce (1758). Nommé cardinal (1758) puis archevêque d’Albi (1764), il fut envoyé en ambassade à Rome (1768-1791), où il négocia avec Clément XIV la suppression de la Compagnie de Jésus. Outre des poésies, il a laissé des Mémoires ».

Partie 3. La disgrâce de Bernis. Source : extraits de l’article de Wikipédia.

« François-Joachim de Pierre, cardinal de Bernis, né le 22 mai 1715 à Saint-Marcel-d’Ardèche et mort le 3 novembre 1794 à Rome, est un diplomate, homme de lettres et prélat français qui fut ambassadeur à Venise (1752-1755), ministre d’État (1757), secrétaire d’État des Affaires étrangères (1757-1758) et enfin chargé d’affaires auprès du Saint-Siège (1769-1791).

En juin 1757, Bernis remplace Antoine Louis Rouillé comme secrétaire d’État des Affaires étrangères. Son ministère est d’abord placé sous les meilleures auspices, compte tenu des premières victoires françaises de la guerre de Sept ans. Mais il se rend vite compte que la France n’est pas en état de sortir victorieuse du conflit, et a la naïveté de faire part de ses doutes à Choiseul, alors ambassadeur de France à Vienne. La défaite de Rossbach le 5 novembre 1757 signe un tournant de la guerre. Dès lors, Bernis ne va cesser de prôner une issue rapide et pacifique du conflit pour limiter les pertes françaises. La marquise de Pompadour et Choiseul se retournent alors contre lui pour défendre la poursuite de la guerre et gagner en influence auprès du roi.

Vers la disgrâce

En octobre 1758, Bernis redouble de naïveté en offrant au roi sa démission et son remplacement par Choiseul : il espère en retour se voir confier la direction d’un comité central des ministres qui travaillerait à une restauration des finances de la monarchie. Le 30 novembre, Bernis reçoit la barrette de cardinal, négociée avec Rome depuis plusieurs mois. Mais le 13 décembre 1758, Louis XV fait parvenir au nouveau cardinal une lettre de cachet qui lui enjoint de s’exiler dans l’une de ses abbayes de province. Choiseul prend alors la tête des Affaires étrangères, la France s’enfonce dans la guerre et signe en 1763 le traité de Paris qui la prive de l’essentiel de ses possessions coloniales au profit de l’Angleterre.

L’exil et l’archevêché d’Albi.

Comme lieu de son exil, Bernis choisit le château de Vic-sur-Aisne, qui dépendait de son abbaye de Saint-Médard de Soissons reçue en 1756. C’est donc à Soissons qu’il se fait ordonner prêtre en septembre 1760. Depuis son lieu d’exil, Bernis cultive sa correspondance avec Voltaire, et entame la rédaction de ses Mémoires, dictés à sa nièce la marquise du Puy-Montbrun, dans lesquelles il cherche à justifier son action politique. Il reçoit à partir de 1762 l’autorisation de rendre visite à sa famille en Ardèche et en Languedoc, puis celle de séjourner à la Cour.

En 1764, Léopold-Charles de Choiseul-Stainville, frère cadet du ministre, quitte l’évêché d’Albi pour celui de Cambrai. Le duc de Choiseul œuvre alors à ce que Bernis prenne sa place. Devenu maître du puissant archevêché d’Albi, le cardinal s’y révèle un excellent administrateur, faisant planter des vignes, tracer des routes, et s’occupant des charités publiques. Grâce à de copieux bénéfices ecclésiastiques, il peut mener grand train au palais de la Berbie, où il confie à l’abbé Gabriel Cavaziez la gestion de son importante bibliothèque. Parallèlement, il passe une partie de ses étés en Lozère au château de Salgas, auprès de sa sœur Françoise-Hélène de Pierre de Bernis ».

Partie 4. Bernis. Renforcer le Gouvernement. Source : Books Openedition.

« De retour à Versailles à l’été 1755 après son ambassade de Venise où il s’était appliqué à acquérir « la réputation d’un ambassadeur le mérite », Bernis se dit effrayé de la situation de l’État. Sans doute, accentue-t-il les traits dans ses Mémoires pour augmenter, par un effet de contraste, l’ampleur du redressement qu’il tentera de réaliser au ministère. « Les finances du royaume […] n’avaient que l’apparence de la bonne administration ; car, depuis le traité Aix-la-Chapelle, l’État avait dépensé tous les ans bien au-delà de ses revenus […] tout l’argent du royaume se trouvait entre les mains des financiers. Le commerce était florissant, mais sans protection de la part de la marine guerrière […] Notre milice, quoique assez nombreuse, n’était ni bien composée ni bien disciplinée, et nos places frontières mal pourvues et mal réparées […] Point d’union dans le Conseil, guerre ouverte entre M. d’Argenson et M. de Machault […] le débordement du luxe le plus scandaleux, la misère du peuple, nulle vraie lumière dans le Conseil, aucun courage de citoyen à la Cour, nuls généraux de terre ni de mer à la veille de la guerre ».

Issu de l’entourage de Madame de Pompadour, Bernis est choisi par le roi pour la négociation délicate et secrète du renversement des alliances sur l’échiquier européen qui devait se conclure par « ce chef d’œuvre de sagesse et de politique » que fut, selon Bernis, la signature du traité de Versailles le 1er mai 1756. Artisan de ce rapprochement entre la France et l’Autriche qui allait entraîner la guerre de sept ans contre la Prusse de Frédéric II, Bernis connaît alors une ascension politique rapide ».

Commentaires fermés sur Disgrâce de Bernis (décembre 1758)

Classé dans AA. Histoire 18ème siècle, C. Ile-de-France, D. Allemagne, E. Droit et Sciences politiques

1787. La Convention de Philadelphie

Partie 1. Le Capitaine de vaisseau Latouche-Tréville (1745-1804). Source : extraits d’un article de Wikipédia

« Commandant de l’Hermione, puis de l’Aigle et de la Gloire, il se distingue particulièrement pendant la guerre d’indépendance des États-Unis (1776-1783)…

Louis-René-Madeleine Levassor de La Touche, comte de Tréville dit Latouche-Tréville, né le 1745 à Rochefort et mort le août 1804 à bord du Bucentaure en rade de Toulon, est un officier de marine français du XVIIIe siècle, issu d’une famille de marins…

… Après une campagne en 1776 jusqu’aux États-Unis sur la flûte Le Courrier, il est finalement réintégré dans le Grand Corps comme lieutenant de vaisseau en 1777 et est nommé aide-major du port de Rochefort. Il commande la corvette Le Rossignol, armée de vingt canons, essentiellement pour des escortes de convois dans le golfe de Gascogne, puis la frégate L’Hermione, vingt-six canons, à partir de 1779…

… En plus de ces deux navires corsaires, il s’empare de trois bâtiments de commerce, ce qui lui vaut d’être fait chevalier de l’ordre de Saint-Louis en 1779. C’est à bord de L’Hermione qu’il conduit La Fayette jusqu’à Boston en Amérique, au cours d’un voyage qui dure du 10 mars au avril 1780. À son arrivée en Nouvelle-Angleterre, le général des Touches le charge de diriger la construction de plusieurs batteries pour la défense de Rhode Island. Ayant été autorisé à croiser quelques semaines sur Long Island et à l’entrée de New York, pour y intercepter les bâtiments à la destination de cette ville, il fait deux nouvelles prises. Le juin 1780, il découvrit quatre navires ennemis se dirigeant vers lui. C’étaient la frégate anglaise HMS Iris, de trente-deux canons, et trois autres bâtiments de guerre de moindre taille. Après un rude combat, au cours duquel il a le bras transpercé par une balle, La Touche parvient à mettre en fuite quatre bâtiments britanniques.

Le mars 1781, il se trouve avec l’escadre du capitaine des Touches à la bataille du cap Henry, contre l’escadre anglaise aux ordres de l’amiral Arbuthnot, et est chargé d’aller annoncer au Congrès américain, siégeant à Philadelphie, l’heureuse issue de cet engagement aux insurgés.

De retour en France, à la suite de cette belle campagne, Latouche-Tréville apprend qu’il avait été nommé capitaine de vaisseau par brevet le juin 1781.

En 1782, il commande une division de deux frégates, L’Aigle et La Gloire, parties de Rochefort et chargées d’apporter trois millions de livres en Amérique pour les insurgés et du matériel pour l’escadre du marquis de Vaudreuil.

Dans la nuit du 4 au septembre 1782, au large des Bermudes, il rencontre le vaisseau HMS Hector, ancien vaisseau français de 74 canons pris par les Anglais. En raison de l’importance de sa mission, il cherche dans un premier temps à éviter le combat. Mais, voyant que De Vallonge, le capitaine de La Gloire sous ses ordres, n’avait pas suivi ses intentions, il prend le parti de mener le combat et coule le navire anglais.

Le 12 septembre 1782, alors qu’elles s’approchent des côtes américaines, les deux frégates croisent la route d’une escadre anglaise, commandée par le commodore Elphinstone, composée de deux vaisseaux de ligne, d’une frégate, de deux corvettes et d’un brick. La Touche s’empare du brick, louvoie ensuite pour s’approcher du fleuve Delaware, pénètre dans la baie et jusqu’au milieu des bancs espérant que les bâtiments ennemis n’oseraient pas s’y aventurer. Mais il est poursuivi, La Touche parvient néanmoins à faire évacuer les passagers et les trésors qu’il portait. Il les envoie à terre dans les canots des deux frégates ainsi que les dépêches dont il était chargé.

Dans un ultime mouvement, il tente de remonter le Delaware au risque de s’échouer sur un banc de sable, ce qui finit par arriver à L’Aigle. La Gloire, dont le tirant un pied d’eau était plus faible, parvient à franchir le haut fond et gagne le grand canal. Condamné par la marée descendante à ne pas pouvoir se défendre, il ordonne la sabordage de sa frégate (les mâts sont abattus et des voies d’eau ouvertes) afin qu’elle ne soit pas récupérée par l’ennemi. Après un ultime combat, il finit par amener son pavillon.

Cette défense héroïque sera comptée à La Touche comme une victoire. Fait prisonnier de guerre et sa frégate étant perdue, il avait néanmoins rempli sa mission : le trésor et ses passagers étaient parvenus et l’honneur était sauf.

Défaite ou victoire ?

Commentaires fermés sur 1787. La Convention de Philadelphie

Classé dans AA. Histoire 18ème siècle, BA. Photos, C. Outre-Mer, E. Droit et Sciences politiques, E. Mobilité internationale