La loi ESR violée sans vergogne

Les statuts de la COMUE Université Sorbonne Paris Cité seront soumis au vote des Conseils d’administration des 8 établissements membres, du 19 juin au 3 juillet 2014. Les administrateurs vont-ils voter des statuts non conformes à la loi ESR de juillet 2013 ? Explications.

La version des statuts en date du 22 mai 2014 comprend un article 6.3. qui prévoit des élections au scrutin indirect tant pour le CA de la COMUE que pour son Conseil académique. La loi ESR ne mentionne pas un scrutin indirect pour le Conseil académique.

Les scribes qui ont écrit les statuts n’ont pas commis une erreur anodine. Ils anticipent en effet une modification de la loi par le vote d’un cavalier introduit dans la loi Avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt.

L’histoire de ce cavalier (article 27 bis de la loi) est racontée très longuement sur le site de RESAU : les aventures du cavalier 27 bis. La loi Agricole ne sera pas votée quand les CA des membres de la COMUE SPC débattront des statuts. En effet, la Commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale examinera le texte de loi du 24 au 26 juin 2014. Les opposants au cavalier agricole (i.e. au suffrage indirect, déni de démocratie) s’activent pour mobiliser suffisamment de groupes de députés pour faire sauter le cavalier agricole. Réussiront-ils ?

Dans ce contexte, les CA des 8 membres de SPC vont-ils voter en faveur de statuts qu’il faut bien dénommer « illégaux » ou tout au moins « illégaux » à la date de leur vote ? S’ils osent, ils seront dénoncés pour non respect de la loi.

Le cavalier agricole est une opportunité pour que les opposants à la COMUE SPC soient, cette fois, entendus. Ils devraient dès maintenant préparer un recours en contentieux auprès du tribunal administratif et le déposer si la version des statuts soumise au vote comprend un article instaurant un scrutin indirect pour la désignation du conseil académique de la COMUE.

Un déni de démocratie au quotidien. Conseil d’administration (10 juin 2014) de l’université Paris 7 Diderot, membre de la COMUE SPC. Communiqué de la Liste « Ensemble pour d’Autres Possibles » : pour un moratoire sur les regroupements inter-universitaires. Extrait du communiqué : Tant pour les statuts que pour le règlement intérieur, de longues discussions ont eu lieu, mais sur des versions instables et sans possibilité de véritablement faire modifier les textes. Nous posons dans ces circonstances la question des prérogatives du CA, qui ne peut être ni un simple espace de débat sans décision, ni une chambre d’enregistrement.

5 Commentaires

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5 réponses à “La loi ESR violée sans vergogne

  1. Gabriel Galvez-Behar

    Bonsoir,

    Pourriez-vous nous dire où la loi du 22 juillet 2013 interdit une élection au suffrage indirect du CA et du CAC d’une COMUE ? J’ai beau chercher, je ne trouve pas.

  2. Nico

    Bonjour,
    Les COMUE sont des EPSCP auxquels s’appliquent notamment le chapitre IX du titre 1er du livre VII du code de l’éducation (cf article L718-7 du code de l’éducation issu de la loi ESR). Dans ce chapitre, il est prévu à l’article L719-1 du code de l’éducation (extrait):
    « Les membres des conseils prévus au présent titre, en dehors des personnalités extérieures et du président de l’établissement, sont élus au scrutin secret par collèges distincts et au suffrage direct.  »

    C’est vrai qu’il faut être un juriste averti pour s’en rendre compte. C’est d’ailleurs un des problèmes majeurs de cette loi: sa complexité.
    Un juriste aguerri l’identifiera rapidement comme un exemple de monstre verbeux, technocratique, hors sol…

    • Gabriel

      Merci de votre réponse. Deux choses cependant. L’article L719-1 porte sur les EPSCP en général mais son contenu renvoie aux universités (preuve qu’il a été mal modifié par cette loi mal faite). Par ailleurs l’article L711-4 prévoit que des dérogations peuvent permettre de ne pas appliquer l’article L719-1, notamment.

      • Nico

        L711-4 ne concerne que les dérogations pouvant être prévues à la création de l’EPSCP. A priori cet article n’est pas applicable aux COMUE.

        Le régime par défaut d’élection aux conseils des COMUE est bien celui prévue à l’article L719-1 car il y a renvoi explicite de l’article L718-7.

        Pour être tout à fait complet: les COMUE sont des EPCSCP à statut dérogatoire, comme les grands établissements. L’article L719-1 et son décret d’application sont bien applicables aux conseils des COMUE qu’en tant qu’il n’y est pas porté de dérogation législative dans le régime spécifique des COMUE (L718-7 précise « sont applicables…sous réserve des dispositions de la présente section »), comme cela est prévu aux articles L718-11 et L718-12.

        Pourquoi faire simple, quand on peut faire n’importe quoi ?

  3. Groupe Jean-Pierre Vernant

    Pour le CA, le scrutin est réglé par 718-11. La possibilité de scrutin indirect n’est laissée qu’aux ComUÉ de plus de 10 membres. C’est la raison pour laquelle il y a un bourrage de pseudo-membres qui n’ont rien à faire là, un peu partout pour franchir la barre des 10. Exemple: SPC a toujours compté 8 membres (dont un de Rennes qui n’a strictement rien à faire là d’un point de vue territorial). Il serait logique de donner un statut de membre associé représenté au CA pour le CNRS et l’INSERM. Mais non, car l’objectif est une prise de pouvoir par une petite clique aussi malfaisante qu’incompétente.

    Une anecdote: il y a un an, lors de la discussion de la loi au Sénat, un amendement écologiste portant (en partie) sur le scrutin direct a été photocopié par le cabinet ministériel pour distribution en commission. La version distribuée comportait la mention « scrutin direct ou indirect » alors que la version déposée par la sénatrice écologiste comportait uniquement la mention « scrutin direct ». Il y a donc eu faux et usage de faux dans une procédure législative. C’est inédit sous la 5ème!

    On voit par là que le groupe Marc Bloch (dont le recouvrement avec la CPU actuelle et retraitée est significatif) sait depuis fort longtemps ce qu’il fait en construisant ces usines à gaz non démocratiques: un coup d’état permanent.