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1790-1795. Le Clergé réfractaire

Le Clergé réfractaire. Source : extraits d’une notice de Wikipédia.

Diaporama de 9 photos. Anonyme, Estampe allégorique, Persécution du Clergé Catholique Romain en France, 1791. Source : Cabinet des estampes et dessins de Strasbourg.

« On donne le nom de Clergé réfractaire ou d’Insermentés aux ecclésiastiques hostiles à la Constitution civile du clergé, décret adopté en France par l’Assemblée nationale constituante le 12 juillet 1790 lors de la Révolution française. Une part d’entre eux fut exilée, massacrée ou déportée. Nombre d’entre d’eux entrèrent dans la clandestinité, pour continuer d’assurer, autant que possible, leur apostolat.

Ce clergé réfractaire s’oppose au clergé jureur (dit aussi clergé assermenté ou clergé constitutionnel) qui reconnaît cette Constitution ».

Les débuts de l’antichristianisme révolutionnaire.

« Dès le départ du mouvement, on assiste, en effet, à une série de mesures prises contre l’Église catholique, en France, dès 1789-1790 : suppression de la dîme, interdiction des vœux religieux.

En juillet 1790, est promulguée la Constitution civile du clergé, qui soumet l’Église catholique au pouvoir civil, ainsi que le serment à la Constitution civile, à prêter dans la huitaine. Le roi Louis XVI accepte de promulguer le décret de la Constituante, ce qu’il regrettera amèrement à partir du moment où le pape Pie VI manifeste son opposition.

Le clergé réfractaire désigne alors ce clergé clandestin, ayant refusé de prêter serment. S’ensuit rapidement la répression contre ces prêtres et leurs protecteurs.

En décembre 1791, Louis XVI met son veto à la loi du 29 novembre 1791, qui refuse aux prêtres non-jureurs la liberté de culte, puis, en mai 1792, à la loi du 27 mai qui ordonne la déchéance de la nationalité pour tout réfractaire dénoncé par 20 citoyens ou par un seul en « cas de trouble ».

Malgré l’émeute du 26 juin 1792, il le maintient et quelques arrestations ont déjà lieu, comme le 17 juin 1792, en Maine-et-Loire, le 19 en Côte-d’Or, le 20 à Mayenne ou, encore, le 28 dans le Morbihan.

Cependant, la rupture avec la monarchie du 10 août 1792 va permettre leur application officielle, et les premiers massacres commencent : le 14 juillet, un prêtre est tué à Limoges, neuf dans le Var ; le 15, deux à Bordeaux, dont un rédacteur de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.

Le 26 août 1792, les prêtres réfractaires, qu’on peut estimer au nombre de 75 000, doivent quitter la France dans le délai de 15 jours. À cette occasion, le député Isard affirme : il faut renvoyer ces pestiférés dans les lazarets de Rome et de l’Italie

Le phénomène de déchristianisation se caractérise tout d’abord par le fait que ce mouvement a été de très courte durée, et ensuite qu’il ne fut pas organisé par le pouvoir central. Le gouvernement de salut public et la Convention sont hostiles ou en tout cas circonspects face à ce phénomène.

C’est de province que partent les premières initiatives de fermeture d’églises, sous l’égide de représentants en mission ou des Comités de Surveillance. Mais Paris se mobilise presque simultanément. Le 17 novembre 1793, dans une réunion du comité de Salut public, qui est alors le gouvernement effectif de la République, Robespierre dénonce la déchristianisation qui pour lui risque de faire basculer les pays neutres (surtout protestants) dans l’opposition à la France. Le 21 novembre dans un discours au club des Jacobins, il se prononce pour la liberté des cultes. Danton le soutient dans sa lutte contre les Hébertistes qui sont alors les principaux hommes politiques favorables à la déchristianisation. Aussi le 6 décembre, la Convention réaffirme la liberté des cultes, même si le 8 elle décide de na pas rouvrir les églises fermées.

Dès lors, et même si des contre-exemples ont pu exister, soit celui de réfractaires réprimés non pour avoir été réfractaires mais pour avoir commis des actes considérés comme contre-révolutionnaires, la répression des réfractaires prend un caractère paradoxal : elle n’est active que là où la répression s’avère globalement la moins forte.

Ce paradoxe s’accentue de surcroît au cours d’une période très brève : de floréal à thermidor an II. Cette période est encore nettement délimitée à cause de la législation répressive. En effet la Convention, en deux temps, le 26 germinal an II puis le 19 floréal an II, centralise la répression des contre-révolutionnaires à Paris, à quelques exceptions locales près.

Or ces textes, d’une extrême importance, exceptent les réfractaires, ce qui provoque encore une distorsion géographique. Au centre, à Paris, devant le tribunal révolutionnaire, sont jugés désormais les ennemis du peuple, autre version de l’étiquette aristocratique  ou contre-révolutionnaire. Dans les départements, et plus particulièrement dans ceux les plus tranquilles, puisque les exceptions locales concernant les textes de germinal et de floréal ne concernent que des départements troublés et frontières où sont conservées des commissions révolutionnaires, le jugement « hors de la loi » des réfractaires est exceptionnellement maintenu.

De fait, l’alliance entre nombre de municipalités manifestement attachées à leurs prêtres et les juges des tribunaux criminels conduit à épargner des réfractaires.

Sous la Terreur, un prêtre réfractaire n’est pas un hors la loi comme les autres. Tout ennemi objectif de la Révolution qu’il paraisse, il bénéficie plus que les autres hors la loi du traitement juridictionnel spécifique de son affaire. L’habileté des juges qui fut en prairial assimilée à la chicane de l’avocature d’Ancien Régime, comme le poids de l’opinion si difficile à évaluer notamment dans les campagnes, infléchissent la répression.

Le 7 mai 1794, Robespierre donne un coup d’arrêt à la déchristianisation. La Convention décrète que le peuple français reconnaît l’existence de l’Être Suprême et de l’immortalité de l’âme. L’existence de l’Être Suprême et l’immortalité de l’âme sont des éléments qui ne sont pas apparus en contradiction avec la façon de vivre le protestantisme au XVIIIe siècle.

Certains pasteurs voyaient dans les cultes révolutionnaires la réalisation d’une partie de leur idéal religieux. A titre d’exemple, on peut citer le conventionnel Lombard-Lachaux d’Orléans : je n’ai jamais prêché que l’amour de la liberté, de l’égalité et de mes semblables ; mon unique désir est de continuer à concourir au bien des sans-culottes.

Après 1794, d’une part et dans un premier temps, le législateur lui-même fait preuve à l’encontre des réfractaires d’une agressivité bien moindre que sous la période « terroriste ». Toute la législation répressive est marquée par les hésitations, les ambiguïtés voire les contradictions d’un pouvoir en réalité engagé dans une impasse à propos de ses relations avec l’Église. Les juges s’engouffreront dans la voie ouverte par cette incohérence. D’autre part et dans un deuxième temps, le pouvoir révolutionnaire lui-même se transforme. L’exécutif et plus particulièrement sa composante ministérielle, absente sous la Terreur, tentent de prendre le relais du législateur dans sa lutte contre les réfractaires. Contrairement aux ambitions terroristes, paradoxalement très proches de l’idéal constituant dans leur absolu légicentrisme, le pouvoir révolutionnaire prend acte sous le Directoire de l’impuissance de la loi. Il tente d’opposer au juge, non des représentants en mission ou des sociétés populaires locales, mais ses ministres ».

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Lorient, la Compagnie des Indes

Lorient : la Construction navale, la Traite négrière, la Compagnie perpétuelle des Indes (1719-1769), la Guerre d’Indépendance américaine.

Sources. Extraits d’un article de Wikipédia dédié à l’Histoire de Lorient. Pour aller plus loin : Les Compagnies des Indes, sous la direction de René Estienne, Gallimard, 2017.

Partie 1. La Marine royale et la construction navale

Marine royale et construction navale s’implantent sur le site de Lorient sous l’impulsion du Jean-Baptiste Colbert de Seignelay, fils de Colbert, qui a hérité de la charge de secrétaire d’État de la Marine de son père. Des corsaires venant de Saint-Malo y trouvent également refuge à la même époque.

1687. L’opération d’adaptation du port démarre.

1688-1710. Le chantier est réquisitionné pour la Marine royale en 1688 lorsque la guerre de la Ligue d’Augsbourg éclate et, en 1690, les premiers navires de guerre y sont armés. La construction de plusieurs navires y est également assurée et, de 1690 à 1708, dix-huit bâtiments militaires sortent du chantier. Ces chantiers drainent entre 800 et 900 ouvriers, principalement des Provençaux, des Normands, des Basques ou des Nantais. La Compagnie des Indes doit également céder plusieurs structures à la Royale : le magasin général, la corderie et la voilerie sont cédés en 1689, ainsi qu’une partie des logements l’année suivante.

1700. La ville se développe en dehors du périmètre de l’Enclos dans le respect d’un arrêt de 1700 qui oblige les populations à quitter les abords de celui-ci pour s’installer sur la grande lande du Faouédic.

1702. La ville compte alors quelque 6 000 habitants, mais les activités de la Compagnie des Indes orientales comme celles de la Marine royale restent réduites et la ville commence à décliner.

Partie 2. 1719-1769. Lorient, active dans la traite négrière, siège d’une Compagnie des Indes.

La ville connaît un nouvel essor lorsque John Law de Lauriston crée la Compagnie perpétuelle des Indes en achetant plusieurs autres compagnies commerciales et qu’il choisit Lorient comme base pour ses opérations. La Marine royale est peu disposée à laisser les installations de l’Enclos à la nouvelle compagnie, mais le Conseil de marine ordonne à celle-là le 28 juin 1719 de libérer les lieux, ce qui est effectif à la fin de la même année.

1720. Malgré l’effondrement du système de Law, la ville connaît une nouvelle phase de développement. Par la ville transitent annuellement en moyenne 400 000 livres de poivre, 500 000 livres de thé, 1,5 à 2 millions de livres de café, 150 000 pièces de cotonnades et de mousselines et 150 000 pièces de porcelaines de Chine.

1720-1790. C’est pendant cette période que la ville prend part au commerce triangulaire et que 156 navires y participent entre 1720 à 1790 en déportant quelque 43 000 esclaves. À l’époque où la traite nantaise marque le pas et où la Compagnie des Indes obtient le privilège exclusif de faire le commerce de Guinée, ce qui comprend la traite négrière , Lorient s’affirme comme le premier port négrier français entre 1723 et 1725.

1732. La Compagnie perpétuelle des Indes décide de transférer de Nantes à Lorient le siège de toutes ses ventes, et demande à l’architecte Jean-Charles Gabriel de construire de nouveaux bâtiments en pierre de taille pour accueillir ces activités et embellir l’espace de l’Enclos. Les ventes s’y réalisent à partir de 1734 et on y traite jusqu’à vingt-cinq millions de livres tournois. Le monopole de la Compagnie est cependant aboli avec la disparition de celle-ci en 1769 sous l’influence des physiocrates.

Les capacités de construction navale augmentent avec la mise en chantier en 1728 d’une cale et un premier vaisseau de 600 tonneaux, le Philibert, en sort en 1730. À partir de 1732, trois navires en sortent chaque année, permettant un renouvellement total de la flotte de la compagnie en douze ans. En 1755, trois nouvelles cales sont ouvertes à Caudan sur l’autre rive du Scorff.

La ville profite de la prospérité de la Compagnie. Elle compte 14 000 habitants en 1738 et 20 000 en incluant la population des faubourgs de Kerentrech, de Merville, de La Perrière, de Calvin et de Keryado. La population de la ville vient majoritairement de Bretagne.

1735. De nouvelles rues tirées au cordeau sont tracées intra-muros.

Sous sa première forme, la Tour de la Découverte est élevée entre 1737 et 1744 ; cette première tour ne faisait que 25 mètres de haut. Elle fut reconstruite de 1785 à 1786 après avoir été touchée à deux reprises par la foudre.

En 1738, la ville acquiert le statut de communauté de ville. Des travaux d’embellissement commencent alors, comme le pavage des rues, la construction de quais et de cales en bordure du ruisseau du Faouédic, ou encore la démolition de chaumières remplacées par des maisons calquées sur les modèles de l’Enclos.

1744. Des murailles sont érigées pour fermer la ville, et sont mises à contribution dès septembre 1746 par un raid britannique contre la ville (siège de Lorient). Un hôpital municipal, l’Hôtel-Dieu, est ouvert en 1740 grâce au don d’une philanthrope à la ville.

Dès 1754, la ville et la Compagnie perpétuelle des Indes projettent la construction d’un établissement de santé commun. Celui-ci est obtenu en 1766 par la fusion de la structure municipale et d’une autre structure de la compagnie et, en 1771, il accède au rang d’hôpital de deuxième classe.

1769. La disparition de la Compagnie perpétuelle des Indes provoque une diminution de l’ordre d’un septième de la population de la ville.

Grâce au statut de communauté de ville accordé en 1738, la ville peut envoyer des représentants au parlement de Bretagne. Elle y obtient entre 1738 à 1751 quelque 170 000 livres afin de moderniser ses installations portuaires, ainsi qu’une baisse de sa capitation (impôt par tête) entre 1746 et 1750 à la suite du raid britannique contre la ville. Le poids administratif et politique de la ville reste cependant en deçà de son poids économique et elle dépend d’autres villes proches comme Hennebont pour la justice ou d’autres aspects.

1764. Carte de la ville et de ses fortifications en 1764.

Partie 3. Lorient et la guerre d’indépendance américaine.

1775. La guerre d’indépendance américaine amène à la ville un surcroît d’activité et plusieurs corsaires utilisent la ville comme port d’attache. John Paul Jones utilise à partir de 1778 la ville et son port comme lieu d’attache pour son navire, le Bonhomme Richard et plusieurs de ses prises de guerre y sont rapatriées. Au total, 121 prises effectuées sur les Britanniques par John Paul Jones et par d’autres sont acheminées puis vendues à Lorient.

1783. À la fin de la guerre, plusieurs lignes transatlantiques sont ouvertes de Lorient vers les États-Unis.

1769-1785. La ville commence sa reconversion avec l’achat par le roi des installations de la Compagnie pour 17 500 000 livres tournois pour y installer sa marine. La construction navale privée se développe et, entre 1769 et 1777, l’équivalent de 13 000 tonneaux sont ainsi mis en chantier. Le tonnage construit par la Compagnie puis par la Royale ne représente plus que 39 % de la production totale lorientaise. Le commerce privé se développe dans le même temps et, entre 1769 et 1785, date de la création de la Compagnie de Calonne, Lorient compte pour 57 800 des 151 955 tonneaux armés en France.

Dès 1785, à la demande de Charles Alexandre de Calonne, contrôleur général des Finances, une nouvelle compagnie commerciale est créée, la Compagnie des Indes orientales et de la Chine, qui s’installe à Lorient.

1788. Une bourgeoisie commence à émerger et représente 6 % de la population lors de la capitation de 1788. Celle-ci est issue pour 24 % de la construction navale et pour 43,7 % du commerce. Son développement induit l’éclosion d’une vie culturelle : une salle de spectacle est ouverte en 1778 et compte 790 places. L’année suivante, la ville compte une troupe de théâtre permanente. La loge maçonnique lorientaise est influente à l’époque et compte 105 membres en 1786. Celle-ci est liée initialement à la présence de la Compagnie des Indes.

Partie 4. Lorient et le soutien à la Révolution.

La Révolution française et les guerres contre le Royaume-Uni qui suivent mettent fin aux activités commerciales à Lorient pour près de deux décennies.

La ville est l’une des rares dans le Morbihan à soutenir la Révolution. La bourgeoisie marchande y joue un rôle important dans la diffusion de ses idées et la présence importante d’ouvriers liés à la construction joue un rôle dans la radicalisation du mouvement dans la ville. La ville acquiert grâce à son soutien à la Révolution le titre de chef-lieu de canton en 1790 ainsi qu’un bagne en 1795.

1793-1795. La municipalité prend parti pour les Girondins contre les Montagnards, ce qui entraîne l’arrestation de son maire et l’éviction du conseil de la ville au profit d’éléments plus favorables aux Montagnards. La Terreur touche la ville en 1793-1794 et trente personnes, dont quinze prêtres réfractaires, sont exécutées.

1795. Les campagnes du département sont agitées par une révolte paysanne qui s’estompe fin mars 1793, avant de renaître avec l’arrivée du général Georges Cadoudal, chouan, au printemps 1794 et avec les conséquences de l’expédition de Quiberon de l’été 1795. Les activités commerciales du port continuent jusqu’à la mise en place du blocus britannique en 1793.

À partir de cette date, la construction maritime pour le compte de la République prend le relais des activités de la ville. Ainsi, entre 1793 et 1815, 96 nouveaux navires sont mis en chantier et 86 sont mis en service.

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Hommage à Alain Touraine

Hommage à Alain Touraine (1925-2023).

Je dois à Alain Touraine un début de carrière devenu impossible aujourd’hui pour les jeunes chercheurs. Je me dois de remercier ce brillant intellectuel.

1966-1968. Inscrit en  doctorat 3ème cycle à Lille et bénéficiant d’une bourse de thèse, mon directeur, Jean-René Tréanton, m’incite à participer aux séminaires parisiens dédiés à la sociologie du travail. J’ai suivi ses conseils. C’est à cette occasion que j’ai entendu pour la première fois la voix forte et claire d’Alain Touraine, dans son séminaire de la rue de Varenne (Paris). Il a alors 41 ans, j’en ai 22. Je ne comprends pas tout, mais j’observe chez lui une très grande culture en sciences humaines et sociales, une volonté d’expliquer et de changer le monde.

Automne 1968. Alain Touraine me propose d’entrer dans le Groupe de recherche qu’il dirige, le Laboratoire de sociologie industrielle, à la Maison des Sciences de l’Homme, boulevard Raspail. Il sait que je souhaite poursuivre mes recherches sur le syndicalisme. Il me dit avec conviction qu’il faut désormais s’intéresser aux mouvements sociaux. Il veut faire École, mais pas au prix de la mise au pas de la liberté de recherche.

Je suis affecté à l’équipe qui doit mener une étude sur les grèves de 1968, et chargé des enquêtes dans le Nord (128 grèves). Contrat de travail d’une année pour un salaire égal à 3 fois et demi le SMIG. Alain Touraine n’a jamais été l’exploiteur d’une main-d’œuvre étudiante bénévole, chargée de faire passer des questionnaires.

1969. Concours d’entrée au CNRS. Je suis candidat classé 1er au sein du Labo de Touraine, ce rang étant bien sûr influencé par le directeur. Je suis recruté Attaché de recherche au CNRS à partir du mois d’octobre. J’ai 25 ans.

1971. La liberté de recherche inclut la mobilité institutionnelle et géographique. Quand une partie du labo décide de quitter le père et de créer le Groupe de sociologie du travail, Alain Touraine n’y met pas son veto. Il m’a cependant convoqué pour me demander : et vous, vous partez ? J’ai répondu : oui, je pars avec mes collègues de travail directs. Il aurait pu, avec raison, me qualifier de traitre, d’ingrat ; il ne l’a pas fait. Il est resté mon directeur de recherche pour le CNRS, c’est-à-dire le responsable qui évaluait et signait mon rapport d’activité. Un comportement noble : ni rancune, ni vengeance.

1978 (juin). Alain Touraine accepte d’être membre de mon jury de doctorat d’État. Quand c’est son tour de juger mon travail, intitulé Travail et conflit dans l’industrie, il conclut : dans le fond, cher collègue, vous êtes Proudhonien. J’ai été fier de ce compliment… que je ne méritais pas et que je n’aurais pas eu le courage d’assumer.

1980 (octobre). Je suis nommé professeur de sociologie à l’université de Lille III.

2013 (jeudi 7 novembre). Alain Touraine donne une conférence à la Librairie Kléber (Strasbourg). La salle est pleine à craquer. L’objet : son dernier livre, La Fin des Sociétés (cf. présentation infra). Après son intervention, il est possible d’aller le saluer et d’acheter le livre, avec son autographe. Mais que faites-vous à Strasbourg ? Réponse : nous avons choisi cette ville pour y vivre notre retraite.

Ce fut mon dernier et bref échange avec Alain Touraine. Il avait 88 ans, j’en avais 69.

Merci, Alain Touraine !

La Fin des Sociétés

« Nous sommes, depuis la crise financière, confrontés à cette évidence : avec la décomposition du capitalisme industriel, toutes les institutions sociales, la famille, l’école, la ville, les systèmes de protection et de contrôle social, l’entreprise, la politique elle-même perdent leur sens. Que se passe-t-il pour que les piliers de nos sociétés démocratiques se dérobent ainsi quand la globalisation du monde appellerait leur renforcement ?

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Année 1757. Neuf chroniques du blog

613ème chronique d’Histoires d’universités sur le 18ème siècle. Pour chaque année, évolution des relations internationales (alliances, mariages, guerres, traités de paix, échanges commerciaux). Évènements climatiques, politiques, économiques, scientifiques, artistiques.

Sources. Année 1757 sur Wikipédia (France, Amérique, Asie, Europe), sur Kronobase (107 dates).

Années déjà publiées sur le blog.

1757, deuxième année de la guerre de 7 ans (1756-1763).

Présentation de l’ouvrage

Michel Adanson, 30 ans en 1757

Michel Adanson (1727-1806), naturaliste, explorateur du Sénégal. Il a exploré des régions peu connues des Européens, comme le Sénégal ou les Açores. Principalement botaniste, systématicien original, auteur d’un mémoire célèbre sur le baobab, il a aussi apporté des contributions à la zoologie, à la géographie, à l’ethnographie et aux recherches sur l’électricité. Adanson suivit les cours de Ferchault de Réaumur et de Bernard de Jussieu au Jardin du roi, ancêtre du Muséum national d’histoire naturelle.

1757-1759. Le Poêle du Miroir

Ancien hôtel de la tribu des Marchands ou poêle du Miroir, 29 rue des serruriers à Strasbourg. Diaporama de 30 photos  La riche corporation des marchands et des négociants installe son poêle dans la maison Zu dem Spiegel, citée dans les archives dès 1367. L’immeuble est reconstruit de 1757 à 1759 dans le style Louis XV. Il forme un quadrilatère irrégulier de trois façades donnant sur les rues du Miroir, des Serruriers et Gutenberg . Le maître d’œuvre de la tribu est le maître maçon Jean Louis Müller. Les fonds nécessaires sont avancés par le Quinze Dietrich.

1757 et 1783. Haguenau, Hôpitaux

1757. Reconstruction de l’Hôpital civil de Haguenau : nouveau bâtiment, imaginé par Georges-Joseph Barth. 1783-1788. Construction de l’Hôpital militaire. Le bâtiment est construit à l’initiative de l’Intendant d’Alsace, Antoine de Chaumont de la Galaizière, sur les plans de Charpentier, directeur des Ponts et Chaussées. Il est destiné aux militaires de la province ainsi qu’aux bourgeois de Haguenau. Le plan de l’hôpital est conçu pour être un bâtiment fonctionnel et régulier. Le bâtiment de style de Louis XVI est émaillé de motifs néo-classiques.

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1757-1780. Soufflot, le Panthéon

Prévu à l’origine, au XVIIIe siècle, pour être une église qui abriterait la châsse de sainte Geneviève, le Panthéon a depuis la Révolution française vocation à honorer de grands personnages ayant marqué l’Histoire de France. Les premiers à y être transférés en grande pompe furent Mirabeau, suivi de Voltaire et de Jean-Jacques Rousseau. Diaporama de 15 photos : le Panthéon, l’Église Sainte-Geneviève. La façade principale est décorée d’un portique aux colonnes corinthiennes, surmonté d’un fronton triangulaire réalisé par David d’Angers.

Turgot (1727-1781), 30 ans en 1757

Anne Robert Jacques Turgot, baron de l’Aulne (1727-1781), 30 ans en 1757. 30 années au cours desquelles Turgot suit une trajectoire fidèle à ses origines familiales. En tant que cadet, il est destiné à entrer dans les Ordres, mais y renonce à l’âge de 22 ans. Il commence alors une carrière juridico-administrative : maître des requêtes à l’âge de 26 ans, intendant de la Généralité de Limoges à l’âge de 34 ans. En parallèle, il publie de nombreux ouvrages en économie et en science politique.

1757-1774. Strasbourg : Collège royal, Séminaire, puis Lycée public

En 1919, le Lycée public prend le nom de Fustel de Coulanges. Album de 15 photos. Divers plans sont proposés entre 1755 et 1757 par les architectes Le Mire, Joseph Massol et Saint Martin. Finalement choisis, les plans de Le Mire sont exécutés de 1757 à 1759, sous la direction de Massol, architecte de l’évêché. L’expulsion des jésuites de France, en 1762, transforme l’établissement en collège royal. Entièrement en pierre de taille de grès rouge, la façade sur la place est animée par des saillies matérialisées par des chaînages à refends, surmontée de frontons curvilignes.

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Raids anglais sur les côtes de France

1756-1763. Guerre de Sept ans. Raids anglais sur les côtes de France (Rochefort, Saint-Malo, Cherbourg, Saint-Cast).

« La première décision que prit William Pitt à son arrivée aux affaires fut de lancer l’opération contre Rochefort. De juillet 1757 à septembre 1758, il n’eut de cesse de promouvoir les descentes sur les côtes de France. Si ces mesures avaient pour premier objectif de contenter Frédéric II de Prusse, l’allié de la Grande Bretagne, qui souhaitait des opérations de diversion, le contexte politique intérieur s’avère néanmoins déterminant pour comprendre ces opérations ».

Quiz. Quel est le raid de la Guerre de Sept ans, non mentionné dans cette chronique, qui fut un réel succès pour les anglais ? Quand et pourquoi l’occupation anglaise s’est-elle terminée ? Réponse : il s’agit de la prise et de l’occupation de Belle-Ile de 1761 à 1763.

Partie 1. Septembre 1757. Raid anglais sur Rochefort

Source. Edmond Dziembowski, La place des descentes sur les côtes françaises dans la politique de William Pitt l’Ancien (1757-1758), Annales de Bretagne et des Pays de L’Ouest, 114-4,  2007, Varia, p. 119-131.

« Pitt entendait consolider son assise au Parlement, ménager son allié politique, le Prince de Galles, et, enfin, préserver son image d’homme fidèle à ses idées. Ses raids sur les côtes de France prouvaient son attachement au principe de non-intervention dans la guerre d’Allemagne qu’il avait défendu lorsqu’il était à la tête de l’opposition patriote.

Considérées dans le cadre planétaire de la guerre de Sept Ans, les descentes anglaises sur les côtes de France apparaissent de prime abord comme des épisodes secondaires. Mobilisant des effectifs limités pour des opérations de courte durée, ces expéditions, au mieux, se soldèrent par un coup d’éclat sans lendemain (la prise de Cherbourg en août 1758), et, au pire, par de terribles humiliations (le fiasco de Rochefort en septembre 1757 et le désastre de Saint-Cast en septembre 1758). En définitive, leur histoire pourrait très bien se résumer à la plaisanterie qui courut en Angleterre après l’échec de Rochefort : pris d’un accès de vandalisme teinté de snobisme, le ministère britannique s’employait à briser des fenêtres en utilisant des guinées comme projectiles.

Loin d’être anecdotique, ce trait d’humour nous mène directement au problème que posent ces descentes aux historiens de la guerre de Sept Ans. Tandis que la situation en Amérique semblait réclamer des mesures fortes, pourquoi avoir dispersé les énergies en promouvant ces expéditions coûteuses et hasardeuses ? Pourquoi, alors que l’humiliation de Rochefort militait pour un arrêt immédiat de cette stratégie, s’être obstiné pendant une année entière en lançant trois nouveaux raids sur les côtes françaises ? Au centre de ce questionnement se tient la figure du promoteur de ces opérations, William Pitt l’Ancien, secrétaire d’État au département du sud de novembre 1756 à avril 1757, et de juin 1757 à octobre 1761. L’œuvre ministérielle de Pitt et, plus largement, son parcours d’homme politique ont fait l’objet d’un vaste débat chez les historiens anglo-saxons. À la lumière de ces travaux, il convient d’examiner la stratégie mise sur pied par Pitt en la confrontant au cadre politique et au débat public qui l’ont vue naître. Comme il sera loisible de le souligner, les positionnements partisans sur la politique étrangère ainsi que l’ambition affichée par Pitt de gouverner d’une manière ostensiblement différente de celle de ses prédécesseurs conditionnèrent dans une large mesure ces descentes qui, en leur temps, ont été décrites sous le ton de l’ironie.

Dans son étude consacrée à la conduite de la guerre de Sept Ans, R. Middleton estime que les opérations sur les côtes de France ont été « la contribution la plus distinctive de Pitt au conflit ». Revenu au pouvoir le 29 juin 1757 après une éphémère expérience ministérielle (novembre 1756-avril 1756), Pitt ne tarda pas, en effet, à apposer sa marque aux hostilités. Jusqu’à son retour aux affaires, les principaux théâtres d’opération, du côté britannique, étaient l’Amérique du Nord, cause première de la guerre de Sept Ans, et l’Inde, où s’affrontaient les troupes des compagnies française et anglaise. En Allemagne, où le conflit s’était étendu après l’offensive de la Prusse contre la Saxe (août 1756), l’Angleterre se contentait de payer une armée d’observation chargée de défendre l’Électorat de Hanovre. À ce canevas, Pitt apporta une nouveauté de taille. Il reprit à son compte une suggestion émise quelques mois plus tôt par Frédéric II. Confronté à la menace d’une intervention simultanée des troupes de la Maison d’Autriche, de la France, de la Suède et de la Russie, le roi de Prusse demandait que l’Angleterre, son alliée, soulageât sa position en lançant une opération de diversion qui obligerait Louis XV à rappeler une partie de ses troupes engagées en Allemagne. Dès la mi-juillet 1757, Pitt obtint le soutien du roi et du Cabinet pour son premier projet de descente, dont l’objectif était Rochefort. Aussitôt, Frédéric fut informé de l’imminence d’une puissante diversion  sur les côtes françaises.

Ce n’est que le 8 septembre que l’expédition commandée par Sir John Mordaunt et escortée par la flotte de l’amiral Hawke quitta Portsmouth pour gagner son objectif. Le 3 octobre, elle était de retour, l’oreille basse : la « puissante diversion » avait fait long feu. Divisés sur les chances d’un débarquement, les officiers de l’armée de terre passèrent le gros de leur temps à reconnaître le terrain et à discuter. Finalement, ils décidèrent de faire demi-tour. L’envoyé anglais à Berlin, Andrew Mitchell, rendit compte de l’effet de ce fiasco sur l’image de son pays : jusqu’alors, les Anglais étaient enviés et détestés en Europe. Maintenant, on les méprise« .

Partie 2. Juin 1758. Raid sur Saint-Malo.

Source : article de Wikipédia.

« Pendant l’hiver, alors que se préparaient les plans de campagne pour l’année 1758, Frédéric II exigea une participation militaire effective de l’Angleterre à la guerre d’Allemagne. Pitt fit la sourde oreille. Résigné, le roi de Prusse suggéra de poursuivre les opérations de diversion sur les côtes françaises. La prudence prévalait à Londres : Pitt se rallia à l’avis du Premier Lord de l’Amirauté, l’amiral Anson, qui estimait que l’expédition de Rochefort, en dégarnissant la défense des côtes britanniques, avait été un coup très risqué. Désormais, l’aire d’intervention serait limitée au secteur de la Manche. Le 19 mai, une réunion ministérielle fixa le lieu de la nouvelle descente : l’objectif était Saint-Malo. L’attaque « obligera l’ennemi à conserver une grande force » dans le secteur. Anson prit personnellement le commandement de la flotte chargée d’escorter le corps expéditionnaire commandé par Marlborough et Howe. Débarqués le 5 juin dans la baie de Cancale, les redcoats ne parvinrent pas à prendre Saint-Malo. Mais, avant de se retirer, ils détruisirent l’essentiel des navires corsaires français. L’humiliation de Rochefort était en partie lavée. »Pendant l’hiver, alors que se préparaient les plans de campagne pour l’année 1758, Frédéric II exigea une participation militaire effective de l’Angleterre à la guerre d’Allemagne. Pitt fit la sourde oreille. Résigné, le roi de Prusse suggéra de poursuivre les opérations de diversion sur les côtes françaises. La prudence prévalait à Londres : Pitt se rallia à l’avis du Premier Lord de l’Amirauté, l’amiral Anson, qui estimait que l’expédition de Rochefort, en dégarnissant la défense des côtes britanniques, avait été un coup très risqué. Désormais, l’aire d’intervention serait limitée au secteur de la Manche. Le 19 mai, une réunion ministérielle fixa le lieu de la nouvelle descente : l’objectif était Saint-Malo. L’attaque obligera l’ennemi à conserver une grande force dans le secteur. Anson prit personnellement le commandement de la flotte chargée d’escorter le corps expéditionnaire commandé par Marlborough et Howe. Débarqués le 5 juin dans la baie de Cancale, les redcoats ne parvinrent pas à prendre Saint-Malo. Mais, avant de se retirer, ils détruisirent l’essentiel des navires corsaires français. L’humiliation de Rochefort était en partie lavée.

Bien que la ville elle-même n’ait pas été attaquée, comme cela avait été prévu à l’origine, les Britanniques détruisirent un nombre important de bâtiments de commerce et de navires corsaires avant de réembarquer une semaine plus tard. La composante navale des forces britanniques est commandée par le commodore Richard Howe, alors que les forces terrestres sont conduites par le duc de Marlborough et Lord Sackville.

Au début de l’année 1758, le gouvernement britannique commence à planifier la prochaine descente sur les côtes françaises, et rassemble des troupes sur l’île de Wight. De l’expédition de Rochefort, Pitt tire un certain nombre de leçons. De nouvelles barges de débarquement sont conçues et le processus de rassemblement des troupes est amélioré, permettant ainsi d’avancer la date du départ. La cible désignée de l’expédition est Saint-Malo, un port de pêche abritant de nombreux corsaires, sur la côte bretonne – permettant à la flotte de rester dans la Manche et de pouvoir immédiatement rentrer au port en cas de tentative d’invasion française.

Le 1er juin, l’expédition met à la voile depuis l’île de Wight et elle atteint la baie de Cancale près de Saint-Malo le 5 juin. Dans la soirée, les barges de débarquement transportent les troupes britanniques à terre. Saint-Malo étant situé à l’extrémité d’une chaussée, les Britanniques espéraient s’en saisir afin de couper l’approvisionnement en eau potable de la ville. Une fois à terre, la seule opposition immédiate à laquelle les troupes britanniques doivent faire face est l’artillerie française, qui est bientôt réduite au silence par les canons embarqués à bord des vaisseaux britanniques restés au large. Les troupes débarquées se mettent alors en marche en direction de Saint-Malo, mais les commandants britanniques réalisent rapidement que la ville ne pourrait être prise sans un long siège – ce qui laisserait le temps aux Français d’envoyer des renforts qui les écraseraient. Aussi, décision est prise de se replier sur le petit port de Saint-Servan, où 30 navires et 100 autres bâtiments sont brûlés.

Des troupes sont également envoyées en reconnaissance en direction de Dol, située plus à l’est. Ces éclaireurs rapportent l’arrivée d’une importante force française et Marlborough décide qu’il est alors temps de réembarquer. Les 11 et 12 juin, les Britanniques remontent à bord des vaisseaux de l’expédition.

La flotte britannique croisera une semaine de plus au large de Saint-Malo, avant de reprendre sa route le long de la côte, à la recherche de nouvelles cibles. Des attaques sur Le Havre et Caen sont un temps envisagées avant d’être abandonnées. Les Britanniques concentrent alors leur attention sur Cherbourg en Normandie. Cependant, le mauvais temps les empêche de mener à bien les débarquements de troupes prévus pour les 29 juin et 3 juillet et, étant à court d’eau potable, Marlborough décide de reprendre le chemin de Portsmouth.

Bien que l’expédition ait échoué à prendre Saint-Malo, elle est considérée en Grande-Bretagne comme un succès. En apprenant qu’une importante flotte avait quitté l’Angleterre, l’inquiétude gagne le gouvernement à Paris, qui croit alors que cette flotte est destinée aux Flandres où elle pourrait faire la jonction avec les armées allemandes conduites par le Duc de Brunswick qui venaient de traverser le Rhin. Lorsque l’on découvre que Saint-Malo était la cible de l’expédition, paradoxalement, le sentiment général est un sentiment de soulagement. Cependant, à l’image du raid sur Rochefort, cette descente soudaine sur les côtes françaises inquiète et un nombre plus important d’hommes sont affectés à la défense des côtes.

En septembre de la même année, à la suite du succès de la descente sur Cherbourg, une deuxième force britannique, placée sous les ordres de Thomas Bligh tente un nouveau raid sur Saint-Malo. Mais, attendus par un important contingent français, ils sont contraints de réembarquer, en essuyant de lourdes pertes. Cette défaite marque la fin de la politique de raids et de descentes navales, les Britanniques préférant désormais engager davantage de forces en Allemagne plutôt que de risquer un nouvel échec.

Malgré ce dernier revers, ces raids ont atteint leurs objectifs dans la mesure où ils atteignent le moral de la population française, et montrent que le territoire de la France métropolitaine était lui aussi sous la menace des attaques britanniques. En réponse, la France planifie une invasion de la Grande-Bretagne, destinée à mettre un terme au conflit, mais ces plans doivent être abandonnés après les défaites de Lagos et de la baie de Quiberon ».

Partie 3. Août 1758. Raid sur Cherbourg.

Source : article de Wikipédia

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1679-1790. Des marines de guerre

L’essor des marines de guerre européennes (1670-1790), Martine Acerra, André Zysberg, Les espaces maritimes, E-book  PDF, SEDES, 1997, 298 pages.

Vaisseaux et Frégates

Partie 1. Le sujet du livre (4ème de couverture). « On connaît mieux les batailles navales et les amiraux que les ports, les vaisseaux et leurs équipages. Les deux auteurs proposent d’inverser l’approche traditionnelle de l’histoire de la marine de guerre au moyen d’une nouvelle démarche combinant le quantitatif et le qualitatif. Il s’agit de montrer le cheminement technologique, mais aussi économique et culturel, qui conduisit à l’émergence au cours des années 1650-1680, puis à l‘essor des flottes de combat dans l’Europe des Lumières.

Ces flottes sont devenues les instruments très élaborés d’une politique de prestige et de puissance au service des souverains, les vecteurs d’une véritable force de frappe déjà capable, vers 1760, d’intervenir partout dans le monde, de la mer de Chine aux Caraïbes, et du Spitzberg aux Malouines… Mais cette modernité se conjuguait avec le respect très conservateur des savoir-faire traditionnels qui remontaient aux premières navigations hauturières et aux chantiers ancestraux des maîtres d’hache.

Les problèmes de mise en œuvre des flottes et de mobilisation navale sont abordés aussi concrètement que possible : comment un vaisseau de ligne est construit et armé ; qu’est-ce que la gestion d’un port-arsenal, la logistique, le recrutement des équipages ; qu’est-ce qu’un matelot trouve dans sa gamelle, comment il travaille et se divertit. Ce livre est conçu dans une perspective largement européenne et comparative, qui propose des synthèses et des séries statistiques souvent inédites.

L’étude du développement des marines de guerre montre des convergences certaines, au plan des techniques de la marine en bois et de l’organisation de la vie à bord des grands voiliers. Elle révèle aussi des divergences et des écarts : le long duel franco-anglais, cette seconde « guerre de Cent ans », ne peut se comprendre si l’on ne possède pas les courbes et les statistiques montrant en parallèle l’évolution de la Royale et la Navy, que le lecteur trouvera réunies dans ce livre. C’est pourquoi le mot Marine s’écrit ici au pluriel : les marines« .

Partie 2. Les marines de guerre dans le dernier tiers du 17ème siècle. Source : citations du Chapitre V. Les Hommes de l’art et de la prévision (pages 121 à 132)

Entre le charpentier expérimenté du 17ème siècle et l’ingénieur mathématicien du 18ème siècle se retrace la longue intégration au service de la marine militaire d’un monde initialement indépendant et libre de toute emprise étatique (page 122).

1671 (mars). Un Conseil de construction est instauré dans chaque arsenal ; il est destiné à examiner les devis des charpentiers.

1689. Ordonnance instaurant un début de hiérarchie professionnelle dans les arsenaux. Chaque arsenal doit comprendre dans son personnel permanent un maître charpentier.

La formation pratique des charpentiers du 17ème siècle est fondée sur le lien familial et la caution professionnelle d’un aîné dans le métier… Il en résulte l’existence parfois séculaire de charpentiers qui se maintiennent dans un port ou essaiment dans l’ensemble des arsenaux.

Tels les Mallet à Rochefort. Telle la famille des Coulomb à Toulon. L’association père-fils est fréquente sur les chantiers de construction.

Pour aller plus loin : Eric Rieth, Le Livre de construction des vaisseaux du maître charpentier toulonnais François Coulomb (1654-1717), Actes des congrès nationaux des sociétés historiques et scientifiques, Année 2002, 124-7, pp. 31-55.

La domination des dynasties de charpentiers s’accompagne de la présence imposée de maîtres charpentiers étrangers, chargés d’imprégner de leurs connaissances les pratiques locales (page 125).

1690-1714. Louis Phélypeaux (1643-1727), comte de Maurepas (1687) et de Pontchartrain (1699), secrétaire d’État à la marine de 1690 à 1699, chancelier de France de 1699 à 1714. Il repère deux constructeurs curieux et avides de connaissances, Blaise Geslain et Joseph Blaise Ollivier. Il les destine à des missions d’observation. Il fait ainsi entrer la Marine royale dans l’ère des bouleversements.

Partie 3. Les marines de guerre sous Louis XV et Louis XVI. Source : citations du Chapitre V. Les Hommes de l’art et de la prévision (pages 121 à 132).

1727, 1737, 1739. Blaise Geslain et Joseph Blaise Ollivier (1701-1746) partent espionner les marines hollandaises et anglaises. Leurs séjours sont rendus fructueux par leurs capacités à interpréter les plans, à capter visuellement des différences de carènes. Ils les amènent à proposer de nouvelles maximes de construction dont l’essentielle est la normalisation ; pour y parvenir, il faut uniformiser la formation  des charpentiers constructeurs.

Buste de Blaise-Joseph Ollivier par Yves Collet

La première forme d’uniformisation de la formation consiste à obliger les jeunes gens qui se destinent à la construction navale de se rendre de leur arsenal d’origine à celui de Brest afin de se former aux nouvelles techniques, sous la direction de Joseph Blaise Ollivier (pages 125-126).

La seconde forme sera la création d’une école.

1741. La petite École de Construction de Paris, devenue la Grande École en 1748.

L’origine de l’École remonte à 1741, date à laquelle Henry-Louis Duhamel du Monceau, inspecteur général de la Marine, créa une école à Paris destinée aux maîtres-charpentiers de marine.

Portrait de Duhamel du Monceau par François-Hubert Drouais. Posés devant lui, les Éléments d’architecture navale sont présentés comme son œuvre majeure.

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L’agriculture au siècle des Lumières

L’agriculture au siècle des Lumières. Chronique en quatre parties : 1. Agriculture dans l’encyclopédie, 2. Le rôle de Bertin, 3. Les Sociétés royales d’agriculture, 4. L’émergence d’une médecine vétérinaire.

Partie 1. Agriculture. Source : extraits du long article de l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert, volume 1, 1751, pages 183 à 190.

« L’agriculture est, comme le mot le fait assez entendre, l’art de cultiver la terre. Cet art est le premier, le plus utile, le plus étendu, & peut-être le plus essentiel des arts…

Henri III. Charles IX. Henri IV. se sont plûs à favoriser par des Reglemens les habitans de la campagne. Ils ont tous fait défenses de saisir les meubles, les harnois, les instrumens & les bestiaux du Laboureur. Louis XIII. & Louis XIV. les ont confirmés. Cet article n’auroit point de fin, si nous nous proposions de rapporter toutes les Ordonnances relatives à la conservation des grains depuis la semaille jusqu’à la récolte. Mais ne sont-elles pas toutes bien justes ? Est-il quelqu’un qui voulût se donner les fatigues & faire toutes les dépenses nécessaires à l’agriculture, & disperser sur la terre le grain qui charge son grenier, s’il n’attendoit la récompense d’une heureuse moisson ?

La Loi de Dieu donna l’exemple. Elle dit : « Si l’homme fait du dégât dans un champ ou dans une vigne en y laissant aller sa bête, il réparera ce dommage aux dépens de son bien le meilleur. Si le feu prend à des épines & gagne un amas de gerbes, celui qui aura allumé ce feu supportera la perte ». La loi des hommes ajoûta : « Si quelque voleur de nuit dépouille un champ qui n’est pas à lui, il sera pendu, s’il a plus de quatorze ans ; il sera battu de verges, s’il est plus jeune, & livré au propriétaire du champ, pour être son esclave jusqu’à ce qu’il ait réparé le dommage, suivant la taxe du Préteur. Celui qui mettra le feu à un tas de blé, sera fouetté & brûlé vif. Si le feu y prend par sa négligence, il payera le dommage, ou sera battu de verges, à la discrétion du Préteur…

Pour cultiver les terres avec avantage, il importe d’en connoître la nature : telle terre demande une façon, telle autre une autre ; celle-ci une espece de grains, celle-là une autre espece. On trouvera à l’article Terre & Terroir en général ce qui y a rapport, & aux plantes différentes le terroir & la culture qu’elles demandent : nous ne réserverors ici que ce qui concerne l’agriculture en général ou le labour.

Proportionnez vos bêtes & vos ustenciles, le nombre, la profondeur, la figure, la saison des labours & des repos, à la qualité de vos terres & à la nature de votre climat.

Si votre domaine est de quelqu’étendue, divisez-le en trois parties égales ou à peu près ; c’est ce qu’on appelle mettre ses terres en soles.

Semez l’une de ces trois parties en blé, l’autre en avoine & menus grains, qu’on appelle mars, & laissez la troisieme en jachere.

L’année suivante, semez la jachere en blé ; changez en avoine celle qui étoit en blé, & mettez en jachere celle qui étoit en avoine.

Cette distribution rendra le tribut des années, le repos & le travail des terres à peu près égaux, si l’on combine la bonté des terres avec leur étendue. Mais le Laboureur prudent, qui ne veut rien laisser au hasard, aura plus d’égard à la qualité des terres qu’à la peine de les cultiver ; & la crainte de la disette le déterminera plûtôt à fatiguer considérablement une année, afin de cultiver une grande​ étendue de terres ingrates, & égaliser ses années en revenus, que d’avoir des revenus inégaux en égalisant l’étendue de ses labours ; & il ne se mettra que le moins qu’il pourra dans le cas de dire, nia sole de blé est forte ou foible cette année.

Ne dessolez point vos terres, parce que cela vous est défendu, & que vous ne trouveriez pas votre avantage à les faire porter plus que l’usage & un bon labourage ne le permettent.

Vous volerez votre maître, si vous êtes fermier, & que vous décompotiez contre sa volonté, & contre votre bail ».. .

Lire la suite…

Partie 2. Henri-Léonard Bertin et le développement de l’agriculture au siècle des Lumières. Source : Note historique de Georges Pédro dans Sciences direct.

Partie 3. Les Sociétés royales d’agriculture (1757-1793). Source : extraits de l’article de Bernard Herencia. Histoire et contributions de leurs membres et correspondants au Journal de l’agriculture (1765-1783), Histoire des Techniques, X-1, 2022.

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1786. Réorganisation des arsenaux

La réorganisation des arsenaux. Ordonnance du roi pour diviser les forces navales en neuf escadres. Source en ligne : Gallica BnF. Ordonnance promulguée par le ministre de la Marine de Castries le 1er janvier 1786. 5 escadres à Brest, 2 à Toulon, 2 à Rochefort.

A suivre. Chroniques et photos du blog Histoires d’universités sur l’Arsenal de Rochefort.

Partie 1. Histoire de la marine française sous Louis XIV et Louis XV. Source Wikipédia : bonnes feuilles sur la réorganisation des arsenaux.

« Tirant les premières leçons du conflit [Guerre d’indépendance des États-Unis], de Castries ordonne dès 1783, une réorganisation des arsenaux car ceux-ci ont eu du mal à suivre l’effort de guerre prolongé ».

De Castries, par Joseph de Broze

Arsenal de Brest. « Le premier concerné est celui de Brest. La guerre a mis en lumière son engorgement avec de trop nombreuses tâches à accomplir : assurer la subsistance des escadres et des matelots ; réparer en trois mois d’hiver une armée de 25 vaisseaux ; armer plus de 300 voiles. Les ingénieurs se sont aperçus qu’aucun bassin de radoub de Brest ne peut recevoir les vaisseaux à trois-ponts, voire ceux de 80 canons, sauf aux marées exceptionnelles. La répartition interne de l’arsenal n’est pas commode. Les magasins touchent à la montagne. Les quais sont trop étroits, les cales mal aérées et trop proches les unes des autres. Les services réciproques des ateliers sont constamment mêlés. Dans la perspective d’un nouveau conflit qui semble inévitable à moyen terme, il faut littéralement repenser l’arsenal de Brest, ainsi que la plupart des autres.

Les ordres du maréchal de Castries du 9 août 1783 et du 20 mars 1784 envoyés aux commandants et intendants de chaque arsenal exigent d’eux la confection d’un plan d’aménagement réglé sur les forces navales destinées à chaque base. Les plans d’aménagement et les textes qui les accompagnent révèlent une redistribution spatiale imposée par la rationalisation des procédés de fabrication et de stockage, ainsi que par un meilleur découpage des phases de production et de montage. L’arsenal est modelé, organisé en aires, terrasses, rampes, bassins où s’effectuent des types précis de travaux. L’accumulation des stocks de matières premières et d’agrès oblige à la multiplication des structures de conservation : magasins, halles, hangars, fosses. Les fonctions de construction développent le nombre de bassins, de cales, d’amarrages. L’arsenal est redessiné en fonction de la rapidité et de l’aisance du service, ainsi qu’en fonction du nombre de navires à traiter simultanément. Il devient aussi une zone de communication et de mouvements où homme, matériaux et vaisseaux doivent passer d’un point à un autre selon un ordre et un sens de circulation précis ».

Partie 2. Construction de l’Arsenal de Cherbourg. « En réalité, les plans élaborés ne sont pas immédiatement appliqués sur le terrain. Les réaménagements demandent de nombreuses années car l’Histoire, les habitudes, la géographie et les infrastructures existantes ralentissent l’évolution. C’est Cherbourg, construit à partir de 1783, qui mobilise toute l’attention du ministère et qui bénéficie d’une organisation entièrement pensée sans avoir à tenir compte du passé. Créer une grande base dans la Manche face à la Grande-Bretagne est une préoccupation centenaire depuis Vauban, Le Havre et Dunkerque étant incapables d’accueillir les gros vaisseaux à fort tirant d’eau. Après hésitation entre deux rades, celle de la Hougue et celle de Cherbourg, le choix se fixe sur cette dernière. Cherbourg est à ce moment là une modeste bourgade de pêche donnant sur une rade foraine, c’est-à-dire complètement ouverte. L’idée est de construire un arsenal donnant directement sur la mer, et non plus enfermé dans une rivière comme Rochefort ou au fond d’un goulet protecteur comme Brest.

Pour édifier l’arsenal et le protéger des attaques britanniques (comme en 1758), il faut créer un site artificiel de relâche en fermant la rade par une immense digue capable d’accueillir entre 60 et 100 vaisseaux français et espagnols. Louis XVI approuve les plans de l’ingénieur des Ponts et Chaussées, Louis-Alexandre de Cessart qui propose de construire 90 caissons coniques en chêne devant être immergés et placés à une soixantaine de mètres les uns des autres. Chaque caisson mesure 20 mètres de haut pour 50 mètres de diamètre à la base et doit être lesté de pierres et de moellons, relié à son voisin par des chaines et filets de fer puis complété par des amas de pierres perdues. La digue, qui doit passer à 4 km au large doit être longue elle-même de 4 km à peu près puis être garnie de batteries d’artilleries. Ce projet original, gigantesque, est estimé à 30 millions de livres, sans commune mesure avec la digue de La Rochelle imaginée par Richelieu en son temps ».

« Après des essais effectués au Havre, le premier caisson est remorqué puis coulé le 6 juin 1784 devant une foule de 10 000 personnes massées sur tout le rivage de Cherbourg, alors que la rade est couverte d’embarcation chargées d’autres spectateurs. Cette même année, de Castries vient voir les travaux. »Après des essais effectués au Havre, le premier caisson est remorqué puis coulé le 6 juin 1784 devant une foule de 10 000 personnes massées sur tout le rivage de Cherbourg, alors que la rade est couverte d’embarcation chargées d’autres spectateurs. Cette même année, de Castries vient voir les travaux.

En mai 1786, c’est au tour du comte d’Artois, frère du roi, de faire de même. En juin, c’est Louis XVI, sur proposition de Calonne, qui vient inspecter le chantier en compagnie du ministre de la Guerre et de la Marine. Le roi, qui suit avec passion le développement de sa marine voit la mer pour la première fois. Le 23 juin, Louis assiste à l’immersion du neuvième caisson en présence de l’escadre d’évolution, sous les vivats des équipages, de la foule et des salves des batteries côtières. Le roi déjeune sur la plate-forme de l’un des caissons précédemment immergé puis monte à bord du Patriote, vaisseau neuf de 74 canons aux ordres d’Albert de Rions. Il prend à bord deux autres repas et étonne les officiers par l’étendue de ses connaissances navales.

Le 24, Louis préside à la revue navale depuis le Patriote et assiste à des exercices de tir. Le 25, il inspecte la pointe de Querqueville où un fort doit s’élever puis visite à l’improviste plusieurs corvettes et frégates. L’enthousiasme populaire ne faiblit pas. Marie-Antoinette – qui n’est pas présente car elle est enceinte – décrira ce voyage comme la démarche la plus marquante que le roi ait faite pendant son règne. Dans les faits, il s’agit effectivement de l’une des dernières grandes manifestations d’attachement populaire envers Louis XVI dans les années qui précèdent la Révolution. Au comte d’Hector, commandant de la Marine à Brest qui a fait le voyage à Cherbourg, Louis annonce qu’il a l’intention de visiter tous ses ports. Les évènements vont en décider autrement ».

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Marine Royale. Réformes 1776, 1786

Marine Royale. Réformes de 1776, 1786. Louis XVI, contrairement à ses habitudes, s’est personnellement impliqué dans ces réformes.

Louis XVI, roi de France et de Navarre, par Joseph Siffred Duplessis, 1778

Partie 1. Les Ordonnances du 27 septembre 1776. Contexte : deuxième année de la guerre d’indépendance des 13 colonies britanniques. Recueil d’ordonnances qui conduiront à la réorganisation administrative de la Marine royale et qui permettront notamment à la France de rivaliser avec l’Angleterre dans les années 1780.

Source 1. Gallica BNF

Source 2. Gazette Drouot. Descriptif de vente aux enchères.

Ordonnance du roi, concernant la régie et administration générale & particulière des Ports & Arsenaux de Marine. De l’Imprimerie royale, 1776. In-4, basane marbrée, titre en capitales dorées sur trois lignes sur le premier plat, dos orné, tranches marbrées (reliure de l’époque).

Reliées à la suite :

Ordonnance du roi, pour régler les fonctions dont les Officiers de la Marine seront chargés sur les escadres & à bord des Vaisseaux, relativement aux Consommations & Remplacements des Munitions & des Effets, & aux revues des Équipages dans le cours des Campagnes.

Ordonnance du roi concernant les Officiers de Port.

Ordonnance du roi pour la suppression du Corps des Officiers d’Administration & des Écrivains de la Marine.

Ordonnance du roi, portant établissement de Commissaires généraux & ordinaires des Ports & Arsenaux de Marine, & de Gardes-magasins.

Ordonnance du roi, portant établissement de Commissaires & de Syndics des Classes.

Ordonnance du roi, portant établissement de Contrôleurs de la Marine.

Ordonnance du roi du 19 novembre 1776, portant Règlement sur les Pavillons & marques de commandement que ses Vaisseaux porteront à la Mer.

Partie 2. Les services extérieurs de la marine. Source : Alain Berbouche, Marine et justice, chapitre 2. Les services extérieurs de la Marine et leurs personnels, Histoires, Presses Universitaires de Rennes, Open Edition Books, pp 41-70.

« C’est essentiellement dans les ports et arsenaux royaux que se trouvaient les services extérieurs de la Marine royale. Ils étaient chargés de la gestion des matériels de la Flotte et surtout de la direction de ses personnels ».

Administration des ports & Arsenaux du Roi.

« À la fin de l’Ancien Régime, l’organisation territoriale de la Marine royale partageait le littoral métropolitain du royaume en six départements maritimes : Brest, Toulon, Rochefort, Le Havre, Dunkerque et Bordeaux ; dans cet ordre d’importance stratégique fixé par l’article premier de l’Ordonnance du Roi Portant établissement de Commissaires généraux & ordinaires des Ports & Arsenaux de Marine, & de Gardes-Magasins du 27 Septembre 1776. Cherbourg n’était encore qu’un port de commerce en travaux pour devenir un port militaire ; et l’Orient (sic), l’ancienne base de la Compagnie des Indes annexée par la Marine en 1770, n’était plus qu’une annexe de Brest depuis 1776″.

État des Gens de mer recensés dans chaque département des Classes au 1er Décembre 1777

« En application de l’Article Premier de l’Ordonnance du Roi pour diviser les forces Navales en neuf Escadres du 1er Janvier 1786, la Marine de Louis XVI était divisée en neuf escadres : cinq desquelles entretenues au port de Brest & dépendances, deux à celui de Toulon, & les deux autres à celui de Rochefort. Le cœur de ces départements maritimes était l’arsenal de son port militaire.

Au XVIIIe siècle, ces arsenaux étaient devenus des établissements industriels complexes : cales de constructions et formes de radoubs, fosses pour la conservation des bois immergés en eau saumâtre, parcs à bois séchant, réserves d’ancres et de gueuses de plomb, parcs à boulets rangés en pyramides, chantiers d’artillerie, mâtures et machine à mâter, dépôts et magasins de stockage des matériaux bruts et œuvrés, forges et ateliers de fabrication, services et bureaux de gestion ; logements du personnel : des riches hôtels où résidaient le commandant et l’intendant, aux casernes des soldats et des matelots, en passant par les maisons mises à la disposition des ouvriers et des autres personnels vivant en famille dans l’arsenal etc. Ainsi que les salles de force de la Prévôté de la Marine, l’hôpital et le bagne. Dans les ports secondaires, tels que celui de Saint-Malo qui dépendait de Brest, la Royale se contentait d’installations de moindre importance, tant pour ses services administratifs que pour ses établissements techniques ». Lire la suite…

Partie 3. Les Ordonnances de 1786. Contexte : Les traités de Paris et de Versailles (septembre 1783) reconnaissent l’indépendance des États-Unis d’Amérique. La France de Louis XVI est intervenue sur mer et sur terre pour soutenir les 13 colonies britanniques. Les ordonnances de 1786 consolident la Marine royale, cherchant à lui donner la même puissance que celle de la Marine anglaise.

Source 1. Gallica BNF.

Commentaires fermés sur Marine Royale. Réformes 1776, 1786

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1779. Expédition ratée en Angleterre

Le 8 juillet 1778, la flotte française sort de Brest avec l’ordre de chercher le combat. Sous le commandement du comte d’Orvilliers, la bataille d’Ouessant, le 27 juillet 1778, est indécise mais montre l’esprit combatif de la Marine royale française, beaucoup mieux préparée que pendant la guerre précédente.

Louis Guillouet, comte d’Orvilliers (1710-1792) est un officier de marine et aristocrate. Il sert pendant cinquante ans au sein de la Marine royale pendant la guerre de Succession d’Autriche et la guerre de Sept Ans. Lieutenant général des armées navales et Commandeur de Saint-Louis il se distingue particulièrement pendant la guerre d’indépendance des États-Unis et notamment à la bataille d’Ouessant en juillet 1778,

D’Orvillers avec ses insignes d’amiral et montrant du doigt la flotte anglaise qui fuit

Partie 1. Calendrier de l’alliance franco-espagnole en 1779. Source : article de Wikipédia.

12 avril. Traité d’Aranjuez. Renouvellement du Pacte de famille entre les Bourbons. La France promet à l’Espagne de recouvrer Gibraltar, Minorque, Mobile et Pensacola.

Été. La dysenterie dans l’ouest de la France fait 175 000 morts.

16 juin. Charles III d’Espagne déclare la guerre à la Grande-Bretagne.

L’entrée en guerre de l’Espagne est saluée avec joie par des neutres comme le Danemark et la Suède. Au printemps 1779, la Grande-Bretagne est totalement isolée sur le plan diplomatique. Lord Sandwich peut écrire au roi George III : nous n’avons aucun allié ou ami pour nous assister : au contraire, tous ceux que nous tenions pour nos amis, excepté le Portugal, agissent contre nous et fournissent à nos ennemis les moyens d’équiper leurs flottes

24 juin : début du siège de Gibraltar par la France et l’Espagne (fin le 6 février 1783).

25 juin. Une flotte franco-espagnole de 66 vaisseaux et de 14 frégates se réunit à la Corogne sous les ordres du comte d’Orvilliers. Elle croise en Manche pendant trois mois sans être inquiétée, mais doit se retirer face à la tempête, la disette et l’épidémie; Elle rentre à Brest le 14 septembre.

juillet-septembre : tentative d’expédition en Angleterre.

Partie 2.  L’Armada de 1779. Source : article de Wikipédia.

« L’Armada de 1779 fut une entreprise d’invasion de la Grande-Bretagne par des navires français et espagnols en 1779, lors de la guerre franco-anglaise issue de la guerre d’indépendance des États-Unis. L’objectif de cette invasion était la prise d’abord de l’île de Wight puis de la ville de Portsmouth en Angleterre. Cette invasion forcerait les Britanniques à divertir leurs ressources à la défense de leur propre territoire, loin des théâtres militaires d’outre-mer. Finalement, aucune bataille n’a eu lieu dans la Manche ».

Partie 3. L’Espagne dans la guerre d’indépendance. Tentative d’expédition en Angleterre. Source : extraits de l’article de Wikimonde.

« Les Français voulaient, avant la fin de l’été, mener un débarquement en Angleterre avec le concours des Espagnols ; une autre attaque était prévue contre Gibraltar. 40 000 hommes de l’armée française sont rassemblés sur les côtes de Bretagne et Normandie. Le lieutenant général Louis Guillouet d’Orvilliers commande la flotte française, forte de 30 vaisseaux et 10 frégates, rassemblée dans la rade de Brest : il met la voile vers les côtes d’Espagne pour faire la jonction avec l’escadre espagnole mais celle-ci n’est pas au rendez-vous. C’est seulement le 2 juillet que l’escadre venue de La Corogne, 8 vaisseaux et 2 frégates sous le lieutenant général Antonio González de Arce, se présente au point prévu, suivie, le 22 juillet, par la flotte de Cadix, 28 vaisseaux, 2 frégates, 2 corvettes et 8 brûlots, sous le lieutenant général Luis de Córdova. 20 vaisseaux espagnols se mettent sous les ordres de d’Orvilliers, les autres, commandés par Luis de Córdova, accompagnent à distance comme escadre d’observation. Celle-ci comprend 15 vaisseaux dont la Santísima Trinidad, vaisseau amiral de 110 canons, et 2 frégates.

Ce retard est lourd de conséquences car les Français n’ont pas prévu de provisions pour une longue croisière. En outre, ils viennent trop tard pour intercepter un convoi britannique venu des Antilles qui arrive en Angleterre le 4 août. La flotte combinée se rassemble devant Ouessant et fait voile vers la baie de Torbay dans le Devon mais les équipages manquent déjà d’eau et de vivres et sont affectés par une épidémie. À partir du 17 août, la manœuvre est gênée par des forts vents d’est ; le conseil d’état-major décide que la croisière ne doit pas être prolongée au-delà du 8 septembre. Les Espagnols étaient d’avis de débarquer les troupes sans attendre, l’Angleterre étant alors mal préparée pour une telle attaque, mais l’amiral français voulait d’abord livrer bataille à la flotte adverse et la détruire. Avec 50 000 soldats, la force de débarquement franco-espagnole aurait largement surclassé les 10 000 soldats de l’armée britannique disponibles en Angleterre à cette date.

Le 31 août, la flotte combinée arrive en vue de la flotte britannique, comptant 43 vaisseaux (38 selon William Coxe) sous le commandement de l’amiral Charles Hardy : celui-ci, ne se trouvant pas en force, bat en retraite ; les Franco-Espagnols restent en attente pour surveiller une autre escadre signalée à l’est, qui se trouve être un convoi marchand hollandais venant de Surinam. Huit jours plus tard, conformément aux décisions prises, la flotte combinée se retire vers Ouessant, puis Brest où elle arrive le 14 septembre avec un grand nombre de malades. Le 9 septembre, Luis de Córdova quitte Brest avec 15 vaisseaux et 2 frégates, laissant le reste à Brest sous le lieutenant général Miguel Gastón. Les Espagnols avaient perdu 3 000 hommes par les maladies et les Français au moins autant. Le seul gain de cette campagne est la capture d’un vaisseau anglais de 64 canons, le HMS Ardent, qui s’était aventuré par erreur au milieu de la flotte franco-espagnole en la prenant pour des compatriotes.

L’approche de l’armada franco-espagnole avait provoqué une panique en Angleterre ; cependant, celle-ci prend conscience du danger et entreprend de renforcer les défenses de l’île. L’armée britannique crée plusieurs nouveaux régiments de troupes régulières et de défense territoriale (en Écosse, les Fencibles ). Sur 71 000 hommes de troupes terrestres en Grande-Bretagne à la fin de l’été 1779, beaucoup sont des nouvelles recrues, ou mal encadrées, et leur valeur tactique est incertaine ».

Partie 4. Patrick Villiers, Quand l’épidémie de 1779 sauve l’Angleterre ou la tentative franco-espagnole de débarquement en Angleterre de 1779.

« Une partie des retards français s’explique par les problèmes d’équipage en France. Comme souvent, les équipages basés à Brest ont été frappés par la maladie pendant l’hiver. Fin mars, il manquait quatre mille matelots, c’est-à-dire l’élite des marins. Pour disposer d’un nombre de matelots suffisant par vaisseau, d’Orvilliers a décidé de désarmer plusieurs bâtiments et d’embarquer deux mille soldats pour servir de matelots de pont et bien entendu de recruter de nouveaux marins : les novices.

Dans un premier temps, les maladies semblent avoir disparu. La correspondance échangée au cours du mois de juin entre d’Orvilliers et Sartine ne signale pas de problèmes spécifiquement liés à la santé des équipages ».

Buste d’Antoine Gabriel de Sartine par J-B. Defernex, château de Versailles, 1767

« Cependant, début juillet, la Ville de Paris, le Bien-Aimé, l’Auguste, le Caton, le Saint-Esprit et la Couronne signalent un nombre important de malades. Le commandant en chef ordonne d’envoyer successivement ces navires au repos à la Corogne. Dans ce port, le chef d’escadre Ternay signale sur le Saint-Esprit 130 malades et 87 à bord du Bien-Aimé soit près de 15% de l’équipage.

La pathologie des maladies à bord des vaisseaux est relativement bien connue. Outre les maladies respiratoires, c’est évidemment le scorbut qui domine le plus souvent. Les marins du XVIIIe siècle ont tous remarqué que les premiers symptômes apparaissent au bout de 40 jours de confinement. Le départ ayant eu lieu le 3 juin (mais les marins sont à bord depuis au moins 15 jours) les 40 jours sont largement dépassés le 12 juillet. C’est logiquement que d’Orvilliers envoie les vaisseaux en repos à la Corogne et embarque des vivres frais.

La situation sanitaire s’aggrave à partir du 15 juillet mais d’Orvilliers pense pouvoir la juguler. Le 20 juillet, il propose une nouvelle organisation des malades à bord pour pouvoir combattre la flotte anglaise compte-tenu du nombre élevé de malades ».

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