Lettre ouverte à EducPros.fr

Monsieur le Directeur de la Rédaction, Emmanuel Davidenkoff. Chères consœurs et chers confrères de l’équipe de rédaction et du staff de soutien à la rédaction.

Rappel à l’ordre d’Emmanuel en matière d’attaques ad hominem pratiquées par Histoires d’universités, de publication sur ce blog d’images et de textes au goût douteux, d’accueil sur mon blog de contributions hostiles à la loi ESR (19 février 2014). Ma réponse dans la chronique Attaques ad Hominem et ma décision de suspendre les publications du blog (1 mars 2014). Dissociation de mon blog, unilatérale et sans préavis (3 mars 2014). Confirmation de celle-ci dans la chronique d’Emmanuel (4 mars 2014), assortie du maintien garanti de l’accès au blog pour les lecteurs, mais avec suppression de mon nom de la liste des blogueurs et de la valorisation de mes chroniques en page d’accueil du site (dès le 4 mars 2014). Accusation d’être responsable d(une situation d’incommunicabilité (4 mars 2014)… Tous ces faits m’ont déstabilisé.

Dans ma seconde chronique Attaques ad hominem – celle qui annonce que je publierai moins sur EducPros – (6 mars 2014), je me suis résolu à Appeler un chat un chat. La dissociation est un acte de censure. Histoire d’universités est l’objet d’un traitement ad hominem inéquitable (le statut de dissocié ne figure pas dans la Charte du blog) : censure ! Faute de valorisation en page d’accueil du site, Histoires d’universités est caché à celles et à ceux qui ne le connaissent pas ; son lectorat va donc baisser mécaniquement : censure ! Le rappel à l’ordre et la déstabilisation qu’il a engendrée m’ont conduit à suspendre mes chroniques et à moins publier dans le futur : l’auto-censure est censure !

Dans cette chronique de 6 mars, j’ai fait preuve d’un compromis sans compromission. J’ai ainsi supprimé toutes les images au goût douteux. J’en attendais un compromis réciproque : la ré-association d’Histoires d’universités à EducPros. Elle n’a pas été proposée. Silence d’Emmanuel. Une confiance partagée existait ; elle est aujourd’hui détruite.

Cet acte de censure pratiqué par un directeur de rédaction est d’autant plus grave que celui-ci a oublié que je possédais, en tant que professeur des universités, le privilège des libertés académiques, reconnues par la Constitution. Il a également oublié mon expertise dans le champ de l’enseignement supérieur, bâtie sur plus de 20 années de recherche en France et en Europe (CV 2004-2008).

Il a également oublié que j’étais, parce que sociologue, le seul blogueur d’EducPros à enquêter – comme les journalistes et les pigistes -, à me rendre sur le terrain, à interviewer, à photographier, à me procurer des documents-clés et des données statistiques, à écrire des monographies d’établissements, Il a oublié que cela avait un coût pour un blogueur non rémunéré et sans outil de travail mis à disposition par la Rédaction. Chaque déplacement, en dehors de l’Alsace où je vis, a entraîné des coûts que j’ai financés sur ma retraite, même en cas d’invitation par des présidents d’université, par des organisateurs de colloque, par des directeurs d’école doctorale, par des syndicats enseignants, BIATSS ou étudiants, et même en cas de défraiement partiel et occasionnel par EducPros.

Bien sûr, depuis le rappel à l’ordre du 19 février, j’ai envisagé plusieurs scénarios. Passer du compromis à la compromission (aller à Canossa) ? Arrêter de bloguer ? Rédiger un livre, un Journal couvrant 5 années d’enseignement supérieur et de recherche ? Rejoindre une plate-forme de blogs sur un autre média ? Tenter avec d’autres de créer un blog collectif ?

Me lancer dans l’aventure d’un blog personnel mais coopératif ? J’ai choisi cet avenir difficile, celui d’une 3ème vie d’Histoires d’universités. Je souhaite et j’espère que les lecteurs d’EducPros et de nouveaux lecteurs me suivront dans cette voie. Ces derniers pourront découvrir les chroniques archivées sur le blog EducPros et demeurées ouvertes selon la volonté écrite et réitérée du directeur de la rédaction (je l’en remercie), et selon le Code de la propriété intellectuelle.

Je terminerai cette lettre ouverte par de très sincères remerciements aux journalistes, pigistes, administratifs, informaticiens de la rédaction d’EducPros, avec qui j’ai travaillé et que j’ai côtoyés au cours de ces dernières années. J’en ai toujours apprécié et admiré le professionnalisme, les compétences, la rigueur, l’implication dans le travail, la réactivité, l’efficacité, la bonne humeur, le respect, le sourire. Je vais regretter ce beau moment de ma vie de retraité.

Ils savent qu’EducPros perd un blogueur qui a été sollicité, au printemps 2010, pour participer à la création de la Communauté de blogueurs, qui a été fidèle, qui a publié régulièrement et beaucoup (et même trop !), qui a été le plus lu des blogueurs jusqu’ici et dont le lectorat a été sans cesse croissant. Mais ils savent comme moi que La vie n’est pas un long fleuve tranquille. Merci encore !

2 Commentaires

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2 réponses à “Lettre ouverte à EducPros.fr

  1. Barrois Colombe

    Vraiment heureuse de vous retrouver.Pierre ! Comptez sur moi pour relayer ce nouveau post et les prochains ! Une chaîne anti censure vous soutient !
    Colombe Barrois, UPMC

  2. ASES

    Paris, le 26 mars 2014.

    Comme le rappelait à juste titre Pascal Maillard dans un billet du 2 mars sur Mediapart : “Le blog « Histoires d’universités » de Pierre Dubois, hébergé par le site d’information en ligne EducPros, est devenu au fil des années une source d’informations et d’analyse irremplaçable pour tous les sujets relatifs à l’Enseignement supérieur et la Recherche”. Après un rappel à l’ordre du directeur d’EducPros, Emmanuel Davidenkoff, le 19 février, publié par l’animateur du blog, Pierre Dubois, le blog “Histoires d’universités” est dissocié le 3 mars, du site internet EducPros. Autrement dit, il n’est plus reconnu comme une source de référence sur l’enseignement supérieur et la recherche et sa visibilité sera fortement amoindrie.

    Si l’ASES n’a pas toujours partagé les opinions et les prises de position diffusées sur ce blog, nous considérons néanmoins qu’il représentait une importante source d’informations non disponibles ailleurs (en particulier sur la santé financière des universités) et jouissait d’une liberté de ton rare. En outre, rappelons que Pierre Dubois a exercé professionnellement comme sociologue, chercheur au CNRS de 1969 à 1980 puis professeur de 1980 à 2008 dans trois universités (Lille 3, Paris 10 Nanterre, Marne-la-Vallée).

    Le choix de la direction d’EducPros de pratiquer la “dissociation” du blog pour en affaiblir la portée critique n’honore pas la valeur d’indépendance à l’égard du pouvoir politique, régulièrement invoquée comme principe cardinal de l’éthique professionnelle des professionnels de l’information.

    Il y a deux ans, dans un discours prononcé à Nancy sur l’enseignement supérieur et la recherche, l’actuel Président de la République appelait à “restaurer la confiance avec les enseignants-chercheurs et les chercheurs”. Outre la dégradation générale des conditions de travail dénoncée récemment par l’ASES et souvent par Pierre Dubois, nous considérons que la dissociation de ce blog du site EducPros est un obstacle supplémentaire au bon déroulement de nos activités pédagogiques et scientifiques dans les universités publiques. C’est plutôt une défiance vis à vis du nécessaire débat sur l’avenir de l’ESR.

    Nous nous réjouissons de sa résurgence ailleurs sur Internet et nous continuerons à le suivre.

    Le CA de l’ASES