M2 : la sélection condamnée

13 ans. Oui, 13 ans d’absence de courage politique. Pas de sélection à l’entrée de la licence, pas de sélection à l’entrée de la première année de master, pas de sélection à l’entrée de la seconde année de master, pas d’interdiction de faire un second master dans la foulée de l’obtention d’un premier master. Mieux vaut des jeunes en études que des jeunes au chômage ? Honte aux gouvernements de gauche et de droite ! Honte à l’UNEF ! 89 chroniques du blog sur la sélection.

Un avocat de Fréjus, Florent Verdier, a gagné sa dizaine de recours contre la sélection à l’entrée du Master 2 : dernière victoire, celle de Grenoble.

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L’arrêté d’avril 2002 sur le Master n’a jamais fait l’objet du décret prévu à l’article L612-6 du Code de l’éducation, décret qui aurait permis d’organiser une sélection à l’entrée du Master 2.

L’admission dans les formations du deuxième cycle est ouverte à tous les titulaires des diplômes sanctionnant les études de premier cycle ainsi qu’à ceux qui peuvent bénéficier des dispositions de l’article L. 613-5 ou des dérogations prévues par les textes réglementaires.

La liste limitative des formations dans lesquelles cette admission peut dépendre des capacités d’accueil des établissements et, éventuellement, être subordonnée au succès à un concours ou à l’examen du dossier du candidat, est établie par décret après avis du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche. La mise en place de ces formations prend en compte l’évolution prévisible des qualifications et des besoins, qui font l’objet d’une évaluation régionale et nationale.

Durant 13 ans, en prévision de ce décret, la sélection a été appliquée à l’entrée du Master 2, comme elle l’était dans les diplômes antérieurs de niveau bac+5 (DEA et DESS). En fait, cette sélection ne s’est jamais appliquée partout, tant l’offre de formations de masters était (et est encore) pléthorique.

La lâcheté des politiques est confortée par celle des présidents d’université. Ils seraient pour la sélection à l’entrée du M1, mais la situation actuelle les arrange bien : elle garantit des effectifs importants en 1ère année de Master (un seul exemple, en psychologie à Strasbourg). Ce qui arrange également les enseignants-chercheurs !

Entretien du président de la Conférence des présidents d’université (CPU), Jean-Loup Salzmann, avec Marie-Christine Corbier (les Echos du 13 août 2015). « La CPU défend la sélection à l’université principalement pour des raisons d’insertion professionnelle des étudiants. « La position officielle de la CPU est de dire que, s’il faut une sélection, elle ne peut être qu’entre la troisième année de licence et la première année de master. Mais ce qu’on dit aussi, c’est qu’il faut sécuriser la situation de toutes les universités. Le gouvernement aurait dû prendre un décret mettant les choses à plat (pour rendre la sélection légale entre master 1 et master 2, NDLR). Il ne l’a jamais fait. On demande donc au gouvernement de publier le décret autorisant la sélection entre le master 1 et le master 2, quitte à ce que cela ne soit valable que pour trois ans ».

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9 Commentaires

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9 réponses à “M2 : la sélection condamnée

  1. Luc Perrin

    une remarque : quand un étudiant ayant réussi son M1 ne trouve aucun directeur/trice pour son TER, il a recours au TA pour que le juge assigne un enseignant ? Entre la démission des politiques et le juridisme étroit (des tribunaux et des « syndicats »), l’université va de Charybde en Scylla.
    J’espère qu’en écrivant cela, un TA plus irréaliste qu’un autre n’ira pas dans ce sens et que ce ne sera pas étendu aux thèses avec un rôle d’enseignants (et pourquoi pas Biatos) d’ « astreinte de direction » comme les pharmaciens et les médecins. Démagogie, démagogie chérie …

  2. Edouard K.

    Sur le même sujet, une tribune claire, signée par le bureau de la Coordination des universités de recherche française, est publiée sur le site du Monde :
    http://www.lemonde.fr/idees/article/2015/08/25/l-acces-aux-masters-passe-par-une-plus-forte-selection-des-l-entree-en-licence_4736384_3232.html

  3. Olivier

    Le Master 2 est l’une des rares parties de l’édifice universitaire français qui tienne à peu près la route, notamment grâce à la sélection à l’entrée, qui outre la sélection des étudiants permet surtout de garder des effectifs limités permettant un réel travail avec les étudiants, que ce soit sur le degré d’interactivité, le style du travail demandé en cours, le suivi des stages et des mémoires etc….
    La fin de la sélection en master va détruire les meilleurs masters en leur donnant des effectifs impossibles à gérer mais va aussi détruire les moins bons en les vidant de leurs étudiants (contrairement à ce que pense l’UNEF, une bonne partie des étudiants est plutôt bien informée et connait à peu près la hiérarchie des masters de son champs).
    Enlevons une quelconque sélection en Master et l’édifice entier s’effondrera. Je ne sais pas ce qu’y gagnera l’UNEF. Le président actuel fera peut-être la traditionnelle carrière au PS, mais à quel prix….

  4. Marie Charvet

    Jusqu’à nouvel ordre, n’entrent en M2 que les étudiants qui ont réussi le M1. Il ne faut pas e confondre sélection et « concours ». Les « examens » (quelle que soit la forme qu’ils prennent…) permettent aussi de sélectionner les étudiants en ne retenant que ceux qui ont fait leurs preuves au cours de l’année. Aux enseignants-chercheurs de se mettre d’accord sur ce qu’ils entendent par satisfaire aux exigences des différents M1…

  5. François Sarran

    Peut-on imaginer des évolutions possibles ?
    – Les M2 les plus prisés et sélectionnant d’ores et déjà au niveau du M1 continueront de le faire au vu et au su de tout le monde (et du Ministère en particulier) et assumeront tous les contentieux.
    ou bien :
    – Dans ces master apparaîtra une séparation (ségrégation?), où une partie des étudiants seront considérés comme de seconde classe ?( Les DU peuvent rendre des services de ce point de vue!)
    ou bien :
    -Les Master de classe internationale passeront, avec armes et bagages (le directeur, l’équipe enseignante, voire les équipes d’accueil) à l’étranger dans une Université accueillante

    • Vatin, François

      La disparition de la sélection à l’entrée en M2 était inscrite dans la réforme LMD. Les tribunaux jouent leur rôle en mettant les universités et le gouvernement face à leur responsabilité. La réforme LMD nécessitait l’introduction de la sélection à l’entrée en master. Qui l’a publiquement demandé ? Les universitaires payent le prix de leur pusillanimité.

      Quant à l’Unef, dont la puissance réelle actuelle reste à démontrer, elle est un excellent allié des gouvernements, de gauche comme de droite, pour qui l’université est surtout un instrument d’endiguement statistique du chômage des jeunes : un bachelier professionnel qui s’inscrit à l’université sans aucune chance d’obtenir une licence, un titulaire de deux masters qui s’inscrit dans un troisième, un étudiant qui se réinscrit tous les ans sans passer le moindre examen pour avoir une carte d’étudiant qui l’autorise à faire des stages ce sont tous des chômeurs en moins.

  6. Laurie Roubas

    Bonjour,
    Savez-vous comment se procurer la fameuse « liste limitative des formations dans lesquelles cette admission peut dépendre des capacités d’accueil des établissements et, éventuellement, être subordonnée au succès à un concours ou à l’examen du dossier du candidat » ?
    Merci d’avance !