STRANES et ses 20.000 docteurs !

Trois chroniques sur les perles contenues dans le rapport STRANES (Stratégie Nationale pour l’Enseignement Supérieur) : Pour une société apprenante. Proposition 4 : augmenter le nombre de docteurs, en former 2.0000 par an, dont 12.000 français.

P1380161Selon un rapport de la DGESIP au bas de la photo ci-dessus, 14.596 thèses auraient été soutenues en 2013. C’est faux. Ce chiffre élevé additionne vraisemblablement le nombre de thèses de doctorat et celui des habilitations à diriger des recherches, comme l’indique le tableau ci-dessous (chiffres pour 2013, RERS 2015).

P1380168Mais d’ailleurs quelle mouche a piqué les rapporteurs ? Pourquoi vouloir une telle progression du nombre de doctorats ? 20.000 par an en 2025 ? Un chiffre rond certes, mais pourquoi faire ? Pour être inscrit dans un livre des records ?

Pour arriver à ce sommet vertigineux, il faudrait retrousser les manches et doper les soutiens financiers. Or, qu’ont fait les gouvernements socialistes depuis 2012 pour l’attractivité des études doctorales, la valorisation du doctorat, l’insertion des docteurs dans le public et dans le privé ? Trop de bonnes paroles et de belles promesses mais, dans la réalité, rien ou si peu.

Les recrutements de jeunes chercheurs dans l’enseignement supérieur et la recherche ont été largement bloqués par les gels de postes importants décidés par des universités en crise financière. Les recrutements des docteurs par les entreprises privées ? Aucune incitation pou obligation nouvelle faite pour elles.

Le doctorat : beaucoup de compassion et aucune action.

19 Commentaires

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19 réponses à “STRANES et ses 20.000 docteurs !

  1. Serge

    « l’insertion des docteurs dans le public et dans le privé » : en France, sauf exception (oui j’en connais…trois super succès!), les docteurs n’ont qu’un seul but : s’insérer dans le public ou encore dans l’enseignement privé, faute de place dans le public, ce qui est finalement la même chose et travailler occasionnellement comme consultant. Ok ceci est ma propre expérience et beaucoup diront que ce n’est pas généralisable. En tout cas, dans mes relations avec les docteurs, le privé a toujours été présenté ouvertement comme la solution de remplacement en dernier ressort au cas où toutes les portes du public (+enseignement privé) devaient se refermer. Par conséquent, en tant que recruteur du privé ayant connaissance de ces motivations -donc lettre de motivation bidon- je me demande pourquoi proposer des postes au niveau Bac+8 PhD ; même si nous avons sincèrement besoin dans nos entreprises de l’expertise méthodologique, de la structuration et de l’esprit d’analyse des docteurs.

    • david

      En effet, il s’agit de votre propre expérience. Votre reconnaissance des qualités des docteurs me semble pertinente, votre analyse sur les besoins des entreprises également, mais malheureusement je pense essentiellement faux de dire que les docteurs n’ont qu’une idée : s’installer dans le public. Les entreprises parallèlement ne font qu’un effort d’incitation extrêmement faible en direction des doctorants (des universitaires en majorité), leur préférant la spécificité français des ingénieurs et des « grandes » écoles, ce qui est extrêmement dommageable.

      Il paraît par conséquent paradoxal de vouloir inciter les étudiants à s’orienter vers un doctorat, lorsque ni le secteur publique, ni le secteur privé, ne leur reconnaissent les compétences qui sont les leurs et ne les autorisent à envisager sereinement la poursuite de leurs carrières professionnelles.

      • Serge

        Bonjour David. Merci pour votre réponse à mon commentaire. Quelles seraient selon vous des pistes pouvant rapprocher les « deux camps » (en France) ? Je suis vraiment intéressé par toutes les approches argumentées par des exemples et pouvant contredire ce que j’ai écrit. Merci à vous.

  2. François

    Dans les comparaisons internationales, les deux seuls niveaux qui comptent sont le Bachelor et le PhD; or la force de l’enseignement supérieur français est le nombre de diplômés de niveau bac+5; c’est sans doute la raison pour laquelle la DGESIP majore artificiellement le nombre réel de doctorats en y ajoutant les HDR.

    Concernant les doctorats, j’ai déjà mentionné dans ce blog que le retard français ne provient pas du nombre de doctorats scientifiques (où notre position est tout à fait honorable) mais des autres doctorats dont le nombre, à population égale, est très faible par rapport celui de pays comparables au nôtre.

    Je rappelle au passage qu’au niveau bac + 5 scientifique – masters et diplômes d’écoles – nous sommes champions du monde (le résultat prévisible étant la constitution d’une diaspora française de plus en plus importante).

  3. Les données du RERS 2015 confirment le graphique du rapport STRANES. Si le nombre cumulé de doctorats et d’HDR délivrés en 2013 en France (métropolitaine + DOM) par « l’enseignement supérieur universitaire » atteignait 13748 (page 259 du RERS), il s’avère qu’il y a eu 14 596 « diplômés de doctorat » dans l’année dans la France entière, y compris DOM et TOM.

    Ne me demandez pas d’où viennent les 14596-11822=2774 docteurs manquants (TOM ? établissements non « universitaires » (par exemple écoles ou COMUE) ?), ni pourquoi cette donnée n’était pas publiée dans les RERS précédents…

    • François

      @ Philippe
      Dans le RERS 2015 je ne vois pour chiffres 2013 que :
      – 11 822 doctorats
      – 1 926 HDR
      – Total : 13 748 (p. 259 et 261)
      Où avez-vous trouvé 14 596 ?

      • Oups, j’ai oublié la page, qui est une des nouveautés de l’année (dans l’avant-propos : « le chapitre relatif à la recherche et développement a été enrichi d’une double page sur les doctorants et docteurs (11.1). »). Il s’agit donc du premier tableau de la page 363.

  4. Au temps pour moi, je n’avais pas vu la nouvelle double page et ses trois tableaux 11.1 (y accéder à partir de http://cache.media.education.gouv.fr/file/2015/65/4/depp_rers_2015_recherche_developpement_454654.pdf

    Le nombre de doctorats délivrés est différent et tiendrait aux doctorats délivrés dans les écoles doctorales non universitaires. Surprenant !

    A noter la baisse du nombre de nouveaux inscrits (moindre attractivité du doctorat) et du nombre d’années pour obtenir le doctorat.

    Moindre attractivité du doctorat et volonté de parvenir à 20.000 doctorats délivrés par an : y a comme un problème, non ?

  5. François

    Effectivement, on trouve page 362 du RERS :
     » Les données présentées ici couvrent l’ensemble des écoles doctorales, ce qui explique la différence avec celles des doubles pages 6.4 et 8.21 qui ne concernent que celles rattachées aux universités « .

    Je me demande si la DEPP n’a pas compté deux fois les doctorats décernés conjointement par des écoles et des universités.

    Sinon, le cas de l’informatique (1 800 doctorats annoncés) paraît invraisemblable même si on y inclut les HDR : le chiffre américain correspondant (population 5 fois plus importante, informatique beaucoup plus développée qu’en France) est 1 897
    Voir
    http://www.nsf.gov/statistics/sed/2013/data-tables.cfm
    tableau 12

    • Je ne crois pas à un double comptage de la DEPP, mais plutôt à une interprétation trop restrictive de la formulation « Sciences et technologies de l’information et de la communication ». Pour ces 1800 doctorats en 2013, s’agit-il vraiment uniquement des doctorats en « informatique » ? Probablement pas car parmi les 12177 thèses soutenues référencées à ce jour sur theses.fr pour l’année 2013, seules 657 sont en « informatique ».

      Mais 67 en « sciences de l’information et de la communication », 36 en « informatique et applications », 34 en « automatique », 30 en « traitement du signal et télécommunications », 24 en « automatique, traitement du signal et des images, génie Informatique », etc.

  6. Autre hypothèse pour rendre compte de la différence : 2 bases de données différentes. L’une basée sur les données SISE (inscrits et diplômes délivrés), gérées par la DGESIP

    L’autre, basée sur les données fournies par les écoles doctorales et gérée par la Direction de la Recherche.

    L’absence de coordination entre les services statistiques des deux directions de l’ESR est loin d’être un évènement impossible !

  7. Olivier

    La baisse du nombre d’inscrit doit être assez fortement corrélée à la baisse drastique du nombre d’allocations doctorales. En parallèle, de plus en plus d’ED refusent d’inscrire des doctorants non financés. Dans ces conditions, augmenter le nombre de docteurs relève du vœu pieux. Trouver des sources de financement alternatives relève du parcours du combattant et n’est pas généralisable à l’ensemble des disciplines.

  8. Quelles sont vos sources pour « la baisse drastique du nombre d’allocations doctorales » ? Je ne constate pas de baisse drastique dans le tableau à l’adresse http://publication.enseignementsup-recherche.gouv.fr/eesr/8/EESR8_R_38-le_doctorat_et_les_docteurs-ILL_04.php. Ceci n’empêche pas qu’effectivement, pour augmenter le nombre de docteurs, la meilleure façon de faire est d’augmenter le nombre de financements de doctorants.

  9. Olivier

    J’étais sur une échelle de temps plus longue. Comparez le nombre de bourses dans une ED standard actuelle avec la somme de ce qu’avaient il y a 20 ans les différentes disciplines au sein de la même l’ED et au sein de ces disciplines les différents DEA ou Masters 2 et vous verrez une différence notable.
    Cela dit, même sur les 5 années du document, il semble que le nombre d’allocations diminue.

  10. Marianne

    @serge
    Si vous voulez avoir un exemple de ce qui peut se faire pour rapprocher les deux camps allez voir sur le site de l’AMIES (Agence pour les Mathematiques en Interaction avec les Entreprises et la Societe)
    Allez voir les SEME, le forum emploi maths…ca vous donnera des idees!

    • Serge

      Merci Marianne. Voici déjà un début de rapprochement réussi en me permettant d’aller visiter le site de l’AMIES. Et cela me donne des idées. Ceci étant, sur le fond je suis convaincu qu’une forte interaction est possible. Sur la forme, la communication est souvent rendue compliquée par les acteurs eux-mêmes, une possible rencontre n’étant pas toujours envisagée/envisageable. Puis encore sur la forme, celui qui cherche peut vite se trouver en surcharge par un nombre exponentiel de choix possibles…pour finalement ne pas trouver ; sûrement le propre de notre société de l’information et de la surcharge. Mais par notre échange sur ce blog nous venons de prouver qu’accéder à « l’information », celle correspondant à un besoin, est possible et d’une superbe simplicité: il suffit de parler ensemble!

  11. Marianne

    Il y a aussi des exemples des temoignages, des offres d’emploi….bref plein d’idees…Il y a plysieurs journaux style les echos ou la tribune qui ont deja parle de l’AMIES
    Bref maths et entreprise ca fait son chemin

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