Avignon. Clément VII et les rotuli

Troisième chronique sur les papes en Avignon, leurs relations avec l’université éponyme. 1. Le pape Boniface VIII fonde l’université d’Avignon en 1303. 2. Le pape Urbain V et la contestation étudiante (1367). 3. Clément VII (antipape de 1378 à 1394) et les rotuli (note 1 : les deux Clément VII).

Les rotuli de suppliques ne sont pas chose nouvelle sous Clément VII. Anne-Marie Hayez (note 2) a analysé ceux présentés à Urbain V en 1362-1363 : 5908 suppliques dans 339 rotuli et 5026 suppliques isolées. « La plupart des suppliques étaient d’ordre bénéficial. Celles regroupées dans les rouleaux de parchemin ou de papier avaient une certain unité : étudiants appartenant à une même université, personnages dont la demande était appuyée par un même puissant protecteur, qu’il fût laïque ou ecclésiastique… Des demandes relativement modestes portent soit sur des expectatives de bénéfices à la collation d’un évêque ou d’un évêque et de son chapitre, soit sur des expectatives de prébendes. Or si Urbain V ne modifie que deux fois sur sept le collateur dans le premier cas, quitte à préciser parfois que le bénéfice ne sera pas dans une cathédrale, pour les prébendes il change trois fois sur cinq le lieu demandé et écarte résolument ses familiers des chapitres cathédraux, les dirigent vers des églises collégiales de bien moindre importance ou de bénéfices non désignés ».

Jacques Verger mentionne les suppliques adressées à Clément VII, en 1378 et 1379 lors de son installation à Avignon, et en 1393-1394 à la fin de son pontificat (note 3). « Les premiers contiennent 866 noms dont ceux de 7 professeurs de droit ou d’arts libéraux. Le nombre de quémandeurs est presque multiplié par deux dans les rotuli de 1393-1394 : 1581 noms dont 19 professeurs« .

« Ce sont là des chiffres inattendus, impressionnants, qui placent Avignon à un rang très honorable parmi les universités européennes du temps ; seules, celles de Paris et de Bologne, avec leurs milliers d’étudiants, venaient loin devant »… « De plus ces étudiants étaient d’origines très diverses : en 1378-1379, ils venaient de 148 diocèses différents, en 1393-1394 de 165. La Provence et le Bas-Languedoc fournissaient moins de 15% des effectifs. Les autres venaient de la moitié nord du royaume de France ou des divers royaumes ibériques. Le Grand Schisme avait fait fuir Anglais, Allemands et Italiens, mais ils n’avaient jamais dû être très nombreux à Avignon »…

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« Mais les choses basculeront très vite. Avec les soustractions d’obédience française et le départ de Benoït XIII (1403), Avignon perdra l’essentiel de son pouvoir d’attraction… Désertée par les étudiants d’origine lointaine, elle ne recrutera plus qu’en Provence, dans la vallée du Rhône et le sud-est du Massif central. Son rotulus de 1403 ne compte déjà plus que 408 noms ».

Clément VII, premier antipape du Grand Schisme d’Occident. Celui-ci dura presque quarante ans (de 1378 à 1417). Urbain VI fut pape à Rome de 1378 à 1389, et Clément VII, antipape à Avignon de 1378 à 1394.

« Né à Genève en 1342, Clément VII se nommait Robert et était fils du comte Amédée III et de Marie de Boulogne, cousine du roi de France. Jeune homme , il fut chancelier d’Amiens et chanoine de Paris ; il devient évêque de Thérouanne en 1361 (… 0 19 ans) et de Cambrai en 1368 et fut créé cardinal par Grégoire IX en mai 1371. Légat de Grégoire en Italie, où il commandait une armée de mercenaires bretons, il se rendit responsable d’effroyables massacres dans la guerre contre Florence, surtout à Cesena en février 1377 » (note 4, dictionnaire des Papes, page 475).

Chronique à suivre : l’université et le Grand Schisme d’Occident.

Note 1. Il y a deux papes Clément VII dans l’histoire de l’Église. Le second, pape de 1523 à 1534, est celui qui a subi le sac de Rome en 1527. Il fut le septième Clément et non le huitième, car son prédécesseur était un antipape non numéroté, élu en 1378 par un conclave de cardinaux, révoltés contre le pape Urbain VI qu’ils venaient pourtant d’élire.

Note 2. Anne-Marie Hayez, Les rotuli présentés au pape Urbain V durant la première année de son pontificat (6 novembre 1362, 5 novembre 1363), Mélanges de l’École française de Rome. Moyen-Age, Temps modernes, Année 1984, Volume 96, Numéro 1, pp. 327-394.

Note 3. Jacques Verger, Université d’Avignon, Naissance & Renaissance, 1303-2003, Actes Sud.

Note 4. J.N.D Kelly, Dictionnaire des papes, Brepols, 1994, pages 475 à 479.

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